Chemini 5784 : vive la viande ?

“... voici les êtres vivants que vous mangerez, de parmi les animaux qui sont sur la terre.”
(Vayiqra 11,3)

La paracha Chemini est consacrée au service dans le Michkan (le Temple du désert), plus précisément on y parle du service le jour de l’inauguration du michkan, le 1er nissan.
On y trouve aussi deux autres sujets : la mort des deux fils de Aaron le Cohen Gadol, et l’exposé des lois de cacherout.

Le verset en entête introduit le passage qui présente les animaux autorisés à la consommation : à titre d’exemple, les ruminants qui ont les sabots fendus sont permis.
La Torah nous dit “voici les êtres vivants que vous mangerez…”, mais attention, ce n’est pas une obligation de manger de la viande ! Ce sont en fait les animaux que l’on pourra manger… si on le souhaite.

L’esprit mal tourné pourra traduire le verset par “il faut manger de la viande, et plus on mange, mieux c’est !” Et pourquoi ne pas se goinfrer de viande tant qu’à faire ?

On pourrait se dire, la Torah me permet la viande, alors, allons jusqu’au bout des choses ! mangeons de la viande, et encore de la viande ! Peut-être faut-il décider de vivre pour manger de la viande ?
J’ai ici grossi les traits, mais l’idée est claire : ce n’est pas parce que la Torah autorise quelque chose, qu’il faut exagérer.

En ce moment c’est la guemara Baba Metsia qui est étudiée dans le cadre du daf Hayomi. La michna qui se trouve à la page 33a nous dit :
Celui qui a la possibilité de récupérer un objet perdu de son père, ou son propre objet perdu, alors il choisira son propre objet. Même chose si on a le choix entre son propre objet et celui de son rav, il faudra choisir de récupérer son propre objet.

La Guemara demande : d’où sait-on [que l’on doit donner la priorité à ses propres objets perdus] ? Rav Yehouda cite le verset “A la vérité ! Il n’y aura pas de pauvres chez toi” (Devarim 15,4). Il faut faire les efforts pour ne pas devenir pauvre. La Torah nous demande donc de donner la priorité à ses propres objets plutôt que de tenter de récupérer ceux des autres.

Mais la guemara continue avec Rav Yehouda, qui précise : Attention, celui qui systématiquement donne priorité à ses propres biens, finira par devenir pauvre. En effet, on pourrait très bien penser : “ j’ai raison de ne m’occuper que de mes biens, c’est la Torah, qui me le demande”... Mais à force de ne penser qu’à soi, on se rend pourri. La Torah nous donne la loi stricte, ce qui est possible… mais Rav Yehouda nous précise l’esprit de la loi. Il faut savoir être large et penser à l’autre. Sinon, à force de ne donner la priorité qu’à soi-même, on rate sa vie.

A force d’être persuadé d’avoir raison, même si c’est la loi stricte de la Torah, je peux aller droit dans le mur. Rav Yehouda nous conseille donc :

Tsaw 5784

Voici l'offrande qu'Aaron et ses fils présenteront devant D., chacun au jour de son onction: un dixième d'êpha de fleur de farine, comme offrande, régulièrement [Tamid]; la moitié le matin, l'autre moitié le soir…
(Vayiqra 6,13)

Tsaw est la seconde paracha du 3è livre de la Torah, le lévitique. Cette paracha, comme la plupart des parachiot du Lévitique, est consacrée au service du Temple.

Le verset en entête parle de l’offrande végétale (min’ha) que tout Cohen apporte le jour de son intronisation.

Rashi nous apprend que le verset précise que le Cohen Gadol, apporte cette offrande tous les jours : moitié le matin et moitié l’après midi.

Dans Hagot beparachiot Hatorah, j’ai trouvé l’idée que je tente de présenter ici.
Le Sefer Ha’hinou’h (mitswa 136) explique le pourquoi de l’offrande quotidienne du Cohen Gadol.
 

Le Cohen Gadol est le représentant du public. Il doit donc se sentir partie prenante du peuple. De la même façon que chaque jour on apporte un sacrifice (animal) le matin et l’après midi, pour le public, le Cohen Gadol doit faire sa propre offrande quotidienne.

Quand on est associé à un sacrifice, c’est bien. Mais lorsque l’on apporte soi-même le sacrifice, l’implication est bien plus grande.
 

Plus généralement, participer, apporter sa pierre à l’édifice, permet de se rapprocher.

Ainsi, lorsque un homme fait un cadeau à son épouse, ou lui adresse un mot gentil, il se sentira encore plus près de son épouse.

Lorsqu’un homme accomplit les commandements divins, il se rapproche de D.
L’action conditionne l’attachement que l’on porte.

Vayiqra 5784 - Za'hor - POURIM

 Pourim - La fête de l'Amour !


"Pour les juifs il y avait de la lumière et de la joie, de l'allégresse et de l’honneur …"
לַיְּהוּדִים, הָיְתָה אוֹרָה וְשִׂמְחָה, וְשָׂשֹׂן, וִיקָר

(Esther 8,16)

Nous commençons cette semaine, le troisième livre de la Torah, le livre de Vayiqra, appelé "Le Lévitique", car il a pour thème principal le service de D. (au Temple ou dans le Michkan) qui était effectué par la tribu des Lévi. Cette tribu inclut les Léviim mais aussi les Cohanim.

La première paracha du Lévitique, Vayiqra, est quant à elle consacrée aux offrandes/sacrifices. En effet, il n’y a pas de mots en français pour traduire le concept de « korbane ».

Cette semaine, c'est aussi le chabbat Za'hor « Souviens toi ». Nous avons l'obligation d'écouter ce passage de la Torah : nous avons la mitswa de nous souvenir de ce qu'a fait Amaleq, quand nous sommes sortis d'Egypte.
« Souviens-toi de ce que t'a fait Amaleq, dans le chemin, lorsque vous êtes sortis d'Egypte »
(Fin de la paracha Ki Tetse Devarim 25,17-19)


Nous lisons ce passage le chabbat qui précède Pourim car Aman, qui a voulu exterminer le peuple juif, est un descendant de Amaleq.

Le Rav Dessler, dans le 2è tome du Mi’htav Meeliahou (page 123), nous parle de Pourim.


Il demande : pourquoi le mois de Adar est-il associé à la joie ? Et pourquoi cette joie grandit de jour en jour jusqu’à pourim ? Il demande aussi pourquoi le Ari zal nous dit que la sainteté de Pourim est plus grande que celle de Yom Kippour. Pourquoi dit-on que Yom à HaKipourim, est comme Pourim “Ki-Pourim”. En clair, Kippour atteint presque le niveau de Pourim.
Rav Dessler explique que l'amour naît du don : en donnant, on se rapproche de l’autre, et l’on va développer l’amour envers celui qui reçoit.
Il continue : donner n’est possible que pour l’homme libre. On ne peut pas donner en étant contraint… en tout cas ce n’est pas ce type de don qui développera l’amour. C’est pourquoi, les anges ne connaissent que la dimension crainte. Pour donner et donc aimer, il faut être libre. Les anges n’ont pas de libre arbitre.

Lorsque les Bné Israel ont reçu la Torah, ils ont perdu le libre arbitre. Les miracles étaient tels qu’ils n’ont eu d’autres choix que de recevoir la Torah. Le Rav Dessler cite le Maharal  : leur intellect les contraignait à recevoir la Torah. Lorsque l’on dit que les Bné Israel ont retrouvé le niveau de Adam, le premier homme, avant la faute, c’est la même idée. La faute a donné à Adam la connaissance du bien et du mal. Avant la faute, Adam n’était pas aussi libre qu’après la faute.

A l’époque de Pourim, les Bné Israel ont reçu la Torah par Amour.

En effet, seuls les humains, qui connaissent le libre arbitre, peuvent ressentir pleinement la joie de la punition des méchants. L’homme qui est libre, et qui connaît le le concept de mal, peut ressentir, l’atteinte que l’on porte au nom de D., lorsque l’on porte atteinte à son peuple.

A Pourim, lorsque s’inverse subitement le cours de l’histoire, lorsque la potence prévue pour Morde’hai se transforme en potence pour Aman le méchant, la reconnaissance et la joie s’emparent du peuple juif. Le peuple ressent la joie en assistant à “la vengeance divine” (ce sont les mots du Rav Dessler). Et la joie mène à l’envie de donner (accomplir les mitswot ?), et le don mène à l’amour de D.
Ainsi le peuple commence à servir D. par amour. C’est le sens de la supériorité de Pourim sur Kipourim. Servir D. par amour est plus grand que de servir D. par crainte à Kippour.

Pekoude 5784

«Moshé a vu tout le travail [accompli], et voici, ils l’ont fait comme D. l’avait ordonné, ainsi ils ont fait. Moshé les a bénis. » CHEMOT (39,43).

Nous lirons cette semaine la paracha Pekoudé. Moshé présente la comptabilité mise en place pour expliquer le financement de la construction du Michkan (le Temple démontable du désert). Il veut probablement éviter la suspicion… quant à l’utilisation des fonds.

Comme la semaine dernière, je vous propose un petit commentaire, inspiré du Rav Jonathan Sacks zal l’ancien Grand Rabbin du Royaume Uni. Mais cette fois-ci, je n’oublie pas de citer la source : Son livre Sig Ve-Sia’h. Il a été traduit en Français : LES VOIX DE L'ALLIANCE.

Le Rav Sacks souligne que nous terminons le livre de Chemot, comme nous avons commencé le livre de Berechit.
Dans Berechit, la genèse, la Torah nous raconte la création du monde, qu’elle conclut de la sorte (kidouch du vendredi soir) :
וַיְכֻלּוּ הַשָּׁמַיִם וְהָאָרֶץ, וְכָל-צְבָאָם. וַיְכַל אֱלֹהִים בַּיּוֹם הַשְּׁבִיעִי, מְלַאכְתּוֹ אֲשֶׁר עָשָׂה; וַיִּשְׁבֹּת בַּיּוֹם הַשְּׁבִיעִי, מִכָּל-מְלַאכְתּוֹ אֲשֶׁר עָשָׂה. וַיְבָרֶךְ אֱלֹהִים אֶת-יוֹם הַשְּׁבִיעִי, וַיְקַדֵּשׁ אֹתוֹ: כִּי בוֹ שָׁבַת מִכָּל-מְלַאכְתּוֹ, אֲשֶׁר-בָּרָא אֱלֹהִים לַעֲשׂוֹת
 Berechit (2,1-3).
Les cieux furent TERMINES … D. a TERMINE … le 7è jour son TRAVAIL …. D. a BENI le 7è jour….

Dans notre paracha, nous avons le parallèle.
וַתֵּכֶל--כָּל-עֲבֹדַת, מִשְׁכַּן אֹהֶל מוֹעֵד; וַיַּעֲשׂוּ, בְּנֵי יִשְׂרָאֵל--כְּכֹל אֲשֶׁר צִוָּה יְהוָה אֶת-מֹשֶׁה, כֵּן עָשׂוּ
Chemot (39,32)
Le TRAVAIL (l’oeuvre) fut TERMINE…

 וַיַּרְא מֹשֶׁה אֶת-כָּל-הַמְּלָאכָה, וְהִנֵּה עָשׂוּ אֹתָהּ--כַּאֲשֶׁר צִוָּה יְהוָה, כֵּן עָשׂוּ; וַיְבָרֶךְ אֹתָם, מֹשֶׁה.
Chemot (39,43)
….Moshé les a BENIS.

On trouve donc les mêmes concepts : Le travail accompli, et la bénédiction.
Dans Berechit, c’est l’oeuvre de D., la création du monde, dans Chemot, c’est la construction du Michkan, l’oeuvre de l’homme.


Le Michkan est un rappel qui nous fait ressentir la présence de D. parmi nous. C’est la métaphore de la présence de D. dans le monde.
Malgré les multiples péripéties des Bné Israel dans le désert, malgré les révoltes, malgré le veau d’or, le peuple montre, avec le michkan, qu’il peut être l’associé dans la création du monde.

Le rav Sacks explique aussi l’importance de la bénédiction pour clore la construction du Michkan. Moshé bénit les bné Israel car il veut les encourager à continuer dans la bonne direction. Moshé montre au peuple qu’il est capable d’atteindre des sommets, et qu’il faut persévérer. Fêter un évènement est le fondement du succès de demain.

Encourager est salvateur. C’est l’énergie qui permet de transformer le potentiel en mouvement dans la bonne direction

Chabbat Chalom
Stéphane Haim COHEN

Vayakhel 5784 - Constuire

«Moshé rassembla toute la communauté des enfants d’Israel …» CHEMOT (35,1).

Cette semaine, nous lirons la paracha Vayakel.

Moshé rassemble le peuple pour expliquer la sacralité du chabbat. Puis nous enchaînons sur un nouveau descriptif du Michkan, le temple démontable du désert.
Nous apprenons que le chabbat prime sur la construction du Michkan. Les 39 travaux interdits le chabbat (et leurs dérivés), sont ceux qui ont permis la construction du Michkan.

Le Rav Jonathan Sacks zal l’ancien Grand Rabbin du Royaume Uni, nous présente un commentaire intéressant sur notre paracha, au regard de l’évolution de nos sociétés.

Le Rav Sacks nous raconte comment il a fait la connaissance de Tony Blair. C’était lors d’un voyage en avion, en revenant d’Israel, après l’enterrement de Yist’haq Rabin, le 6 novembre 1995.

Le rav Sacks était assis à côté de Tony Blair. Tout près d’eux, séparés par le couloir de l’avion, le prince Charles (Roi aujourd’hui), les a écoutés attentivement. Le Rav Sacks étudiait le Mikraot Guedolot, et a ainsi présenté les grands commentateurs de la Torah à Tony Blair. C’est ainsi qu’une amitié est née.

Le Rav Sacks n’était pas encore Grand Rabbin d’Angleterre, et Tony Blair n’est pas encore 1er ministre. Tony Blair a confié à son interlocuteur que chaque soir avant de dormir, il lisait un passage de la bible. Dès lors, à chacune de leurs rencontres, ils ne se quittaient pas sans avoir échangé sur le passage qu’avait lu Tony Blair la veille.

Un jour, Tony Blair dit au Rav Sacks : “Je suis arrivé au passage ennuyant”
Rav Sacks : “Quel est ce passage ennuyant ?”
Tony Blair : “La fin du livre de Chemot, celui où on ne cesse de décrire la construction du michkan”.
Rav Sacks : “Pour la création du monde, la Torah consacre seulement 34 versets, mais pour la construction du Michkan environ 500 versets”...

Le Rav Sacks explique que pour D., c’est facile de créer le monde, un lieu de résidence pour l’homme, donc on en parle peu. Mais  pour l’homme, construire un lieu de résidence, pour D., ce n’est pas une tâche aisée. La Torah, n’est pas un livre de l’homme qui traite le sujet de D., la Torah est le livre de D. pour l’humanité. Il est donc logique de beaucoup plus s’attarder sur la construction (humaine) du michkan.
Ainsi s’est terminée la conversation avec Tony Blair.

Mais Rav Sacks, dans son livre, va plus loin, et demande : pourquoi traite-t-on de la construction du Michkan dans le livre de Chemot, le livre de la naissance du peuple juif ? Quel est le lien entre le Michkan et la construction de la nation ?

Le Rav Sacks nous précise que notre société est marquée par le développement du multi-culturalisme. Il ne faut plus de culture dominante dans un pays, tout se vaut. Paradoxalement les tensions ethniques n’ont pas diminué. Ainsi, le Rav Sacks explique qu’au Royaume Uni ces tensions se sont exacerbées. Les fossés se creusent entre les différentes cultures / communautés. Ce n’est pas ainsi que l’on construit une nation.

Moshé a récupéré un peuple d’esclaves. Un peuple a un passé commun. Moshé doit en faire une nation. Une nation a un futur commun. Le peuple ne forme pas une entité. Il y a 12 tribus, il y a le erev rav, de gens qui ont décidé de se joindre aux bné Israel, mais qui sont loin d’être intégrés. Il faut que tous ces individus forment la nation naissante. Et pour cela, il faut un projet.


Le Rav Sacks explique que ce ne sont pas les évènements qui nous touchent qui créent une identité, une responsabilité, ce sont nos actions qui vont nous faire grandir.


La construction du Michkan, c’est LE projet qui va unir le peuple. Alors qu’à plusieurs reprises le peuple s’est plaint pour de l’eau, de la nourriture, des postes à pourvoir … Ici pour le Michkan, pas de plaintes ! Bien que des contributions financières soient requises, le peuple est uni, et court pour participer.


Ki Tissa 5784 - Le compte n'est pas bon

«D. parla à Moshé en disant : Quand tu feras le dénombrement des Bné Israel, d’après leurs recensés, ils donneront chacun le rachat de sa personne à D. lorsqu’on les recensera, et il n’y aura pas fléau parmi eux quand on les comptera.» CHEMOT (30,11-12).

Le début de la paracha nous présente la procédure qui permet de compter les Bné Israel. On ne devra pas compter les têtes. Chaque homme de plus 20 ans donnera 1/2 sicle d’argent. Ensuite, on comptera les pièces, et on en déduira le nombre de personnes recensées.
Voici quelques enseignements que donne Rashi sur le début de la paracha :

  • Quand tu voudras recevoir le total de leur compte (Rashi sur Chemot 30,12).

La Torah nous montre ici que le compte est initié par le dirigeant.
 

  • Compter avec des pièces évite les fléaux. En effet, Rashi sur le même verset explique que le nombre est frappé par le mauvais oeil. De même la peste a frappé à l’époque de de David, après un recensement.

Quel est le rapport entre le recensement et l’épidémie qui pourrait en découler ? Pourquoi compter les hommes est-il dangereux pour le peuple ?

J’espère que je ne vais pas dire de bêtises…

La Torah nous a expliqué que le recensement est à l’initiative des dirigeants. L’objectif est souvent militaire. Je veux savoir quelles sont les forces vives qui permettront de combattre.
D’ailleurs la Torah nous dit :
“Depuis l’âge de 20 ans et plus” (Chemot 30,14). Rashi explique qu’il y a un lien étroit entre l’armée et le recensement. On peut être appelé à l’armée à partir de l'âge de 20 ans, l’âge minimum pour être recensé.

On compte donc les hommes parce que ce sont des outils. Ces hommes sont un moyen de combattre. Compter les hommes c’est donc forcément les limiter. C’est cela le fléau. L’homme est grand, son intelligence est peut être infinie. L’homme peut grandir et tenter de s’approcher de D. Lorsque je le compte, je risque de l’enfermer, alors qu’il pourrait grandir infiniment.

La Torah nous dit donc : ce que tu comptes, c’est l’argent, les moyens. Mais l’homme, hors de question ! L’homme n’est pas un outil, ou un moyen !

Transformer l’homme en outil est terrible. Mais sacraliser le moyen l’est tout autant.

La Paracha Ki Tissa est aussi marquée par l'épisode du veau d'or et sa conséquence : la destruction des premières Tables de la Loi.

L’idolâtrie, c’est le monde à l’envers. Au lieu de m’élever vers D., je crée un dieu, que j’abaisse vers moi. Au lieu d’utiliser les moyens de ce monde pour m’élever vers D., je sanctifie ces moyens.

Tetsawe 5784 - Chacun ses habits

“Et toi, fais approcher de toi Aaron ton frère, et ses fils avec lui, de parmi les Bné Israel, pour qu’il soit Mon prêtre ….” Chemot (28,1)

“Aaron et ses fils porteront [ces vêtements] lorsqu'ils entreront dans la Tente d'assignation….” CHEMOT (28,43).

La Paracha Tetsawe est la suite logique de la Paracha de la semaine dernière (Terouma). Après avoir expliqué la construction du Michkan, le sanctuaire, la Torah présente le Cohen qui y travaillera. La Torah insiste donc sur les habits du Cohen, et sur les tâches que ce dernier accomplira.


Le Rav Ovadia zal donnait un cours hebdomadaire le samedi soir. Le début du cours, c’était un sujet de Hala’ha, puis il terminait par quelques idées, dans son style si particulier, sur la paracha de la semaine. Ces cours du samedi soir, sont repris partiellement dans la série de livres “Michiouré Harashal”.
Ce que je vous présente aujourd’hui est tiré du second volume, paracha Testsawe 5757.


Nos Maîtres nous ont dit que Moshé a été attristé quand il a appris qu’Aaron serait le Cohen Gadol : “Et toi, fais approcher de toi Aaron ton frère, et ses fils avec lui, de parmi les Bné Israel, pour qu’il soit mon prêtre ….” Chemot (28,1)

D. lui a répondu, tu as reçu la Torah, et il n’y a rien de plus grand. La Torah est plus importante que le titre de Cohen, la prêtrise. A tel point que qu’un mamzer, une personne née d’une union illicite, qui est devenu Talmid ‘Ha’ham, érudit, passe avant un Cohen Gadol ignorant. La torah insiste donc : un homme qui fait des efforts, et qui grandit en Torah, vaut plus qu’un simple héritier qui ne possède qu’un nom ou un arbre généalogique !

Le Rav Ovadia explique que chacun a sa mission. Moshé a enseigné la Torah aux Bné Israel. Son frère Aaron, qui aimait la paix et poursuivait la paix, a été le Cohen Gadol. Chacun ses aptitudes, chacun sa route, chacun son chemin.
A chaque génération D. envoie le dirigeant que l’on mérite et qui est adapté. Comme il est dit “Yifta’h dans sa génération était comme Chmouel dans génération”. Mais si Yifta’h avait vécu au temps de Chmouel, il aurait été considéré comme un ignorant.
Le Maguid de Douvna dit qu’on ne peut pas mettre un petit chapeau sur une grosse tête. Et l’inverse est vrai aussi.

Le drame arrive quand on veut porter un costume qui n’est pas sa taille. Les vêtements du Cohen sont réservés au Cohen : chacun son rôle. Quand le roi veut être prêtre, ou que le prêtre veut devenir roi, c’est voué à l’échec.

La première étape est donc de tenter de se connaître

Terouma 5784

«Et ils Me feront un sanctuaire, et Je demeurerai au milieu d’eux » CHEMOT (25,8).

La paracha de la semaine est consacrée à l’explication de la construction du Michkan (= Temple démontable utilisé dans le désert) et à celle des ustensiles qui y étaient utilisés (l’Arche, la Ménora, la Table …).
Le Michkan, puis le Beit Hamiqdach, c’est le lieu que nous devons construire, pour « accueillir la Présence Divine » sur terre.

Le Netivot Chalom, le Admour de Slonim, s’étonne : chaque lettre de la Torah peut être interprétée, souvent la Torah économise des mots, et c’est à nous, grâce aux ‘Ha’hamim, de trouver les secrets cachés. Mais pourquoi, pour la construction du Michkan, 5 parachiot expliquent les détails ? Pourquoi les mêmes détails ont-ils été présentés à plusieurs reprises dans ces 5 parachiot ?

Le Netivot Chalom rappelle que chaque passage de la Torah, même ce qui semble le plus insignifiant, comme les détails sur les moutons tachetés ou rayés de Yaaqov lorsqu’il travaille chez Lavan, a en fait un sens caché.
De même, nous explique le Netivot Chalom, chaque élément du michkan est en fait une allusion aux mondes supérieurs inconnus.
Comme je ne comprends pas grand chose à ce type d’explication (je suis trop jeune ? trop ignorant ? trop terre à terre ?) je vais vous présenter ce que dit le Tora Temima sur le verset en entête. Je l’ai lu, ce jour, mais je viens de réaliser que je l’avais déjà présenté en 5780.

Dans Terouma, la Torah nous demande de construire dans l'espace.
Ainsi, au début de la paracha (verset en entête), D. demande de lui consacrer un lieu.
Pourquoi D. demande-t-il qu’on lui construise un Miqdach (un sanctuaire) ? D. n’est-Il pas partout, pourquoi demande-t-Il une résidence sur terre ?

Dans les Avot de Rabbi Natan, Chap 11, Rabbi Tarfon dit :
Grande est la valeur du travail, puisque D. n'a fait résider sa présence sur Israel qu'après que [le peuple] ait travaillé, comme il est dit (verset en entête) : « Et ils Me feront un sanctuaire, et Je demeurerai au milieu d’eux » CHEMOT (25,8).

Le Torah Temima explique cette dracha. La Torah ne dit pas que D. va résider dans l'endroit qu'on Lui consacre.
D. va résider parmi les bné Israel = « parmi eux ».

En effet, D. n'a pas besoin de résidence, comme il est dit dans Yichayaou 66,1 : « Les cieux sont Mon trône, et la terre mon marchepied, quelle est la maison que vous pourriez me bâtir, le lieu qui me servirait de résidence? »
D. n'a pas besoin d'un lieu pour résider sur terre.

Rabbi Tarfon nous explique donc la grandeur du travail. Pour résider sur terre, parmi les hommes, D. demande qu'on lui consacre du temps (du travail) pour construire le michkan.
 

Encore une fois, ce n'est pas l'espace qui compte, mais le temps et ce que l'on en fait.

Michpatim 5784

«Si un homme ouvre un puits ou si un homme creuse un puits et ne couvre pas, et tombent là bas un boeuf ou un âne. Le propriétaire du puits paiera …
Chemot (21,33-34).

La Paracha Michpatim présente essentiellement des mitswot « sociales » qui régissent les relations entre l’homme et son prochain.
De la même façon que les 10 paroles (les 10 commandements, dans la Paracha précédente, YITRO) proviennent du Mont Sinaï, le lieu de La Révélation, les lois sociales sont aussi issues du Mont Sinaï (Rachi).
Le verset en entête est un exemple de dommage, dont l’homme est responsable : le trou creusé par l’homme dans un domaine rendu public.

Le début de la guemara Baba Qama parle de toutes les catégories de dommage.
Le Netivot Chalom (Admour de Slonim) explique l’enseignement de la Guemara Baba Qama 30a :
Rav Yehuda dit : celui qui veut être ‘Hassid [bon] devra appliquer les lois des dommages “neziqim”, Rava dit les enseignements de Pirké Avot, ou alors les enseignements de la guemara Bera’hot.”

Le Netivot Chalom demande : je comprends bien la relation entre le fait d’être bon et appliquer les concepts des Pirké Avot (Maximes des Pères) ou de Berahot. Mais pourquoi appliquer les lois des dommages ferait de moi un être bon (“hassid”). Quelle est la différence entre les lois des dommages et toutes les autres lois pécuniaires de la Torah ?

Le Netivot Chalom s’intéresse à ce que représentent les 4 catégories de dommages. Ce sont 4 composantes du mauvais penchant de l’homme :

  • Le taureau [Chor] est le symbole de l’orgueil.
  • Le trou est le symbole de l’abandon, la perte d’espoir, le fatalisme
  • Maveé, que le Netivot Chalom explique par “la dent du taureau” = les dommages que le taureau effectue en tirant un profit. Cela représente toutes les envies liées à la nourriture
  • Le feu représente toutes les recherches de plaisir matériel du mauvais penchant.

Celui qui veut être ‘Hassid devra se débarrasser de ces carburants qui entretiennent le mauvais penchant.

Le Netivot chalom explique aussi que celui qui veut être ‘Hassid devra faire plus que respecter les lois des dommages. Il devra en fait étudier les lois des dommages, pour éviter d’en commettre et d’avoir à les réparer.
Le Netivot s’intéresse aux propos de Rava : celui qui veut être ‘hassid devra appliquer les Maximes des Pères.
Alors que les lois des dommages permettent de parfaire les relations entre l’homme et son prochain, les maximes des Pères permettent à l’homme de mieux se connaître et de parfaire sa relation à son moi.

Yitro 5784 - Le don de la Torah

«D. parla toutes ces paroles en disant [Lemor]”
Chemot (20,1).

Cette semaine nous vivons le but de la sortie d’Egypte, le Don de la Torah.

C'est dans la paracha Yitro que tout le peuple va atteindre le niveau de prophète, à tel point que chacun pourra percevoir le message divin. Nous devenons un peuple, qui doit faire un à l’image de D. Le peuple qui diffusera la parole de D. à l’humanité.
Le verset en entête introduit les 10 paroles (souvent traduit par les 10 commandements).

Le Meche’h ‘Ho’hma sur le verset s’intéresse au mot Lemor = en disant. Traditionnellement, le “lemor” est présent lorsque D. parle à Moshé et qu’Il lui demande de transmettre le message aux Bné Israel. A maintes reprises, on trouve dans la Torah “D. a parlé à Moshé en disant”.

Mais cette fois-ci, D. se révèle au peuple entier. On ne comprend donc pas le Lémor.

Le Meche’h ‘Ho’hma rappelle le principe du Rambam (Yesodé Hatorah Chap 8) sur les fondements de la foi. La foi ne peut pas trouver son origine dans les miracles, sinon elle est bancale. La foi trouve son origine dans le fait que les Bné Israel ont accédé à la prophétie si bien qu’ils ont pu écouter les 10 paroles. Ils ont pu percevoir la gloire divine. Tout un peuple a perçu la révélation simultanément au Mont Sinaï. Et le peuple qui a vécu la révélation a eu pour mission de transmettre à ses enfants, puis les enfants à leurs enfants, jusqu’à aujourd’hui. Ainsi il est écrit “Interroge ton père et il te racontera, tes anciens et ils te diront” (Devarim 32,7).

Le Meche’h ‘Ho’hma explique donc ainsi le Lemor = en disant. Les Bné Israel auront pour mission de transmettre leur expérience au Mont Sinaï, à leurs descendants. Ainsi se transmettra la foi de génération en génération jusqu’à la fin des temps.

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