Vaera 5781

« …. Il [Aaron] a frappé les eaux du fleuve aux yeux de Pharaon et aux yeux de ses serviteurs, toutes les eaux du fleuve se transformèrent en sang.»
Chemot (7,20)

 
La paracha de la semaine expose le début du processus de la libération des Bné Israel d’Egypte.
Ainsi, dans Vaera nous trouvons les sept premières plaies (sur 10) qui ont frappé les Egyptiens, avant la fin de l’esclavage des Bné Israel.
Le verset en entête fait référence à la première plaie : Aaron frappe les eaux du fleuve, qui se transforment en sang.
Rashi précise que cette plaie a été accomplie par l’intermédiaire de Aaron. En effet, Moshé a été protégé par le fleuve quand il était nourrisson. Moshé a donc une reconnaissance envers le fleuve, ce n’est pas à lui de frapper le fleuve.


Si le fleuve est frappé en premier, Rashi précise que c’est parce que c’est une divinité égyptienne. Le fleuve est aussi frappé, car c'est là bas que les bébés des bné Israel ont péri. Les Egyptiens ont noyé les enfants des bné Israel dans le fleuve, le fleuve sera donc frappé. Mesure pour Mesure.


Pourquoi est-il si intéressant de savoir que c’est Aaron qui frappe le fleuve ? Pourquoi, la plaie  du sang, comme les neuf autres après, sont toutes des plaies “mesure pour mesure”?


La semaine dernière, dans la paracha Chemot, nous avons assisté à la naissance du prophète, Moshé notre Maître. Comment, Moshé est-il devenu prophète? Il s’est révolté contre l’injustice, il n’a pas supporté voir les souffrances du peuple. Il n’a pas pu accepter l’injustice. Mais il a aussi fait plus. Il s’est fait violence, pour passer à l’action. D. l’a convaincu, lors de l’épisode du buisson ardent, d’aller libérer le peuple.

Comment peut-on libérer un peuple d’esclave ? Comment peut-on apprendre à un peuple la liberté ?
 

Etre libre, c’est savoir, que l’on peut être maître de soi. Etre libre c’est savoir que l’on peut changer. On est peut être né au bas l’échelle sociale, mais on peut la gravir. C’est cela être libre.
Etre libre, c’est voir une injustice, et pouvoir la dénoncer, la combattre, la faire disparaître. Etre libre c’est savoir que l’on peut changer les choses.

Le peuple est né esclave. Le peuple ne voit même plus que c’est injuste de vivre en tant qu’esclave. Le peuple ne pense pas à se révolter. C’est la nature, je suis né esclave, je vivrai esclave. Aux yeux du peuple, vivre esclave, n’est pas injuste, c’est simplement un fait. Rien n’est juste, rien n’est injuste. Il y a juste des faits à accepter. On ne peut pas changer, il faut simplement vivre sa condition d’homme esclave.

Moshé n’est pas d’accord. L’homme est libre, l’homme est grand, l’homme peut changer. L’homme peut changer le monde. S’il y a des injustices, l’homme peut les combattre.
Moshé doit faire passer ce message au peuple. Il n’est donc pas juste que Moshé frappe le fleuve. Le fleuve l’a protégé quand il était nourrisson. C’est donc Aaron qui frappe le fleuve.

Lorsque l’Egypte est frappée mesure pour mesure, le peuple doit comprendre que la justice existe. Il existe un idéal de justice. Les choses ne sont pas immuables. Les bébés des bné Israel ont été noyés dans le fleuve. On comprend maintenant que ce n’était pas simplement dans l’ordre des choses. Il n’y a pas de sous-hommes. Le fleuve va payer pour montrer que la justice existe et que c’est l’idéal à poursuivre.

Le peuple juif naît en Egypte. Les plaies qui frappent l’Egypte vont contribuer à ancrer en lui la haine de l’injustice. L’Egypte va contribuer à créer un peuple qui croit à la grandeur de l’homme. L’homme est grand parce qu’il sait se dépasser. L’homme grandit parce qu’il sait qu’il n’y a pas de destin pré écrit. Le peuple qui naît en Egypte devra être le peuple qui saura que l’homme ne naît pas parfait, mais qu’il peut se dépasser et se parfaire. Le peuple qui naît en Egypte sait que le monde n’est pas parfait, mais que l’on peut agir pour le transformer.

Chabbat Chalom
Stéphane Haim COHEN