VAHET'HANAN 5779

«Tu aimeras l'Eternel ton D. de tout coeur, de toute ton âme, et de tous tes moyens» (DEVARIM 6,5)

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Cette semaine, nous lirons la Paracha Vaet'hanan, suivie de la Haftara Na'hamou. En référence à la haftara, le Chabbat de cette semaine est d'ailleurs souvent appelé "Chabbat Na'hamou" (consolation), car il suit le 9 AV (destruction des deux temples).

Cette paracha commence avec la prière de Moshé, ou plus exactement ses supplications, ses implorations, pour avoir le droit d’entrer en Terre d’Israel.

Dans cette paracha, la Torah présente un rappel des 10 paroles : la Révélation sur le mont Sinaï.

A la fin de la paracha, on trouve le premier paragraphe du Chema. Le passage symbole du judaïsme que l'on récite soir et matin.

Le verset en entête, le début du Chéma, nous énonce un grand principe du Judaïsme : il faut aimer D. En effet, de la même façon que nous avons le commandement d'aimer notre prochain, nous avons aussi l'obligation d'aimer D.

D'ailleurs Rabbi Akiva, un des maîtres les plus importants du Talmud, nous dit qu'aimer D. de toute son âme signifie, que l'on doit même être prêt à mourir pour D. (dans certaines conditions).

Ce commandement d'aimer D. est difficile à concevoir. En effet, on ne dit pas « j'aime », on dit toujours « j'aime quelqu'un ou quelque chose ».

Après le verbe aimer, il y a un complément d'objet direct. On peut aimer sa femme, on peut aimer un ami, on peut aimer les honneurs, on peut aimer le pouvoir, on peut aimer l'argent, on peut aimer l'anisette et la boutargue, ….  mais au bout du compte, on ne peut aimer que quelqu'un ou quelque chose.

On ne peut donc aimer qu'un sujet ou un objet que l'on imagine, ou que l'on perçoit.

Le problème c'est que l'on ne peut pas percevoir D. On ne peut pas non plus l'imaginer ou se le représenter. Toute représentation de D. n'est pas D., mais c'est une idole.

Alors comment aimer D. ?

La réponse, on la trouve dans le verset suivant : «  Elles seront, ces paroles, que je t'ordonne aujourd'hui, sur ton coeur » Devarim (6,6). C'est l'injonction d'appliquer les commandements divins. Ce sont les mitswots à accomplir.

En clair, aimer D. signifie prendre sur soi d'appliquer les mitswot. Mais alors, pourquoi utiliser le verbe aimer pour signifier ceci ? Tout simplement parce que la Torah a employé le langage des humains. Le verbe aimer qui est un verbe fort, chargé de sens, vient nous souligner l'importance de notre mission : accepter les commandements divins et les appliquer. En respectant les mitswot, je vais me rapprocher de D., ainsi il fera partie de mon quotidien. C'est comme cela que je pourrai progressivement L'aimer.

C'est pourquoi, si on annule la pratique des commandements de la Torah, on ne peut plus aimer D. C'est antinomique.
Le second paragraphe du Chema, celui qui commence par « Vehaya », et qui n'est pas dans notre paracha, représente une autre vision du Judaïsme. Alors que le 1er paragraphe nous ordonne d'aimer D. sans contrepartie, le second nous parle des récompenses associées aux commandements.
En clair, le 1er paragraphe représente l'objectif, la Torah s'adresse à un adulte, et lui demande d'aimer D. pour aimer D.
En revanche, le second paragraphe s'adresse à l'homme-enfant, à qui il faut promettre des récompenses pour qu'il accomplisse les mitswot.

Aimer D., sans contrepartie, c'est à dire appliquer les mitswots sans attendre de retour. C'est aussi accepter des lois qui ne dépendent pas de nous. La paracha nous prévient : «vous n'ajouterez  pas à la parole que je vous ordonne et vous ne retrancherez pas ... » (Devarim 4,2).
Si déjà il est interdit d'ajouter, à plus forte raison qu'il est interdit de retrancher des éléments de la Torah. Alors pourquoi la Torah nous demande-t-elle de ne rien retrancher ! C'est évident, pas besoin d'insister !
Le Torah Temima nous explique qu'il faut lire le verset ainsi : «vous n'ajouterez  pas à la parole que je vous ordonne POUR que vous ne retranchiez pas ... ». En effet, celui qui ajoute des éléments c'est comme s'il avait retranché. Ce n'est plus D. qu'il sert en appliquant les mitswots, il se sert à lui-même : c'est lui qui a changé la mitswa.

Chabbat Chalom
Stéphane Haim COHEN,