« Béni sois tu D., Roi qui pardonne nos fautes et les fautes de Son peuple Israel … »
(Amida de Yom Kippour)
Cette semaine, vendredi soir, nous allons vivre Le Jour.
Le jour où même les éloignés reviennent à la synagogue… Le jour où l’on ressent que l’on fait partie du Peuple d’Israel.
Afin de préparer Yom Kippour, je vais tenter de vous présenter en partie la dracha de Chabbat Chouva du Rav. Cette année, au vu des événements, il a décidé de parler de la Techouva du Tsibour (le groupe, le public, le peuple, la nation …) plutôt que de celle de l’individu.
Avertissement :
J’espère avoir compris ce qu’a dit le rav, et ne pas avoir transformé son message. Parfois, j’ai ajouté des idées ou exemples qu’il n’a pas dits.
Je remercie, un ami Moshé Assous, qui a relu et complété ce que j’ai rapporté de la dracha du Rav. Il n’a pas relu cette dernière version.
Comme d’habitude, s’il y a des erreurs, tout est de mon fait.
1/ Le bouc émissaire.
A Yom Kippour, à l’époque du Temple, on devait choisir 2 boucs identiques. Après un tirage au sort, l’un était apporté, pour D., au Temple. Le second était jeté d’en haut d’une montagne, vers le désert, ainsi il mourrait, et il expiait les fautes du Am Israel. (paracha A’haré Mot).
Ce bouc émissaire, Saïr La Azazel, est un concept difficilement compréhensible. En effet, cela ressemble fortement à de l’idolâtrie. En effet, ce bouc était littéralement sacrifié pour le Satan ! C’est comme si on donnait un pot de vin au Satan le jour de Yom Kippour !
Si ce n’est pas de l’idolâtrie, cela y ressemble beaucoup !
Le Ramban résout le problème : ce n’est pas de l’idolâtrie, car c’est D. qui demande de le faire !
Pour comprendre le Ramban, le Rav a rapporté la loi du Arev “le garant”. Normalement pour se marier une femme doit recevoir un bien / cadeau. Sous la ‘houpa, le mari donne une bague, facilement évaluable (donc sans diamant), la femme accepte, et le mariage est scellé.
Mais il peut aussi exister des cas où la femme ne reçoit rien, et malgré tout le mariage sera bien valide. Si la femme dit à Reouven : donne une somme à Chimone, et je deviendrai ton épouse. Reouven ne donne rien à la future épouse, et pourtant le mariage est effectif! Tout simplement car la femme est satisfaite que Reouven donne quelque chose à Chimone. Et Reouven a dit à la femme “voici que tu m’es consacrée par le profit que tu as que je donne de l’argent à Chimone”.
Pour le bouc émissaire, c’est la même chose : D. est satisfait du fait que le bouc soit apporté au Satan … D. est satisfait car nous avons accompli Sa volonté d’apporter le bouc émissaire.
Nous avons expliqué le fonctionnement, l’aspect technique, mais quelle est l’idée sous-jacente?
Le Rav a expliqué que de nos jours, on ne se sacrifie plus pour D.
Qui peut dire qu’il souffre à cause de l’accomplissement des commandements divins. Il y a quelques dizaines d’années, respecter le chabbat était un challenge. On pouvait perdre son travail pour respecter le chabbat. Je connais personnellement, une personne qui a connu la limite de la déprime, et qui au bout du compte a dû abandonner son travail, parce qu’un jour, elle a annoncé à sa patronne et à son patron qu’elle ne pourrait plus venir travailler le chabbat!
Aujourd’hui, en France, avec les 35 heures, et les RTT, terminer tôt le vendredi, c’est bien plus facile ! On ne peut pas dire que l’on se sacrifie pour respecter le chabbat. Et je ne parle pas d’Israel, où la pratique des mitswot peut être naturelle. On ne souffre pas pour accomplir les commandements de D. Et pourtant c’est ce type d’épreuve qui permet d’expier les fautes.
De nos jours, les épreuves sont bien plus insignifiantes ! Imaginons, M. Hulot, qui vient de s’acheter une voiture neuve pour partir en vacances. Mais, manque de chance, la voiture tombe en panne, et chaque jour, il doit aller au garage ! C’est une épreuve ! M. Hulot souffre ! Mais cette épreuve, n’est là que parce que M. Hulot a décidé de s’acheter une nouvelle voiture ! On ne lui a rien demandé !
Prenons le cas de M. Liavé, il rentre chez lui, et cherche ses clés, il ne les trouve pas dans la poche droite, ni dans la poche gauche,... les clés sont dans la poche de son sac. C’est une épreuve, il stresse, mais c’est de la faute à qui ? C’est lui qui a mal rangé ses clés !
Ce type d’épreuves, normalement, ne sont pas expiatrices !
A Yom Kippour, D. nous dit : même les épreuves, dont vous êtes à l’origine, parce que vous avez fait des choix personnels par toujours très fins, Je les considérerai comme des épreuves expiatrices. Vous avez apporté des choses au Satan, des choses futiles, et bien, les épreuves qui en découlent, seront expiatrices ! C’est cela la grandeur de Yom Kippour !
2/ Deux types de Techouva
Voici la 1ère Hala’ha du premier chapitre des Lois de la Techouva du Rambam
כל המצוות שבתורה, בין עשה בין לא תעשה--אם עבר אדם על אחת מהן, בין בזדון בין בשגגה--כשיעשה תשובה וישוב מחטאו, חייב להתוודות לפני האל ברוך הוא: שנאמר "איש או אישה כי יעשו מכל חטאת האדם . . . והתוודו, את חטאתם אשר עשו" (במדבר ה,ו-ז), זה וידוי דברים. ווידוי זה מצות עשה.
On apprend d’abord qu’il y a une mitswa de faire Techouva (repentir) lorsque l’on a commis une faute. Le Rambam précise aussi qu’il faut faire le vidouy = dire sa faute devant D.
כיצד מתוודה--אומר אנא ה' חטאתי עוויתי פשעתי לפניך, ועשיתי כך וכך, והרי ניחמתי ובושתי במעשיי, ולעולם איני חוזר לדבר זה. זה הוא עיקרו של וידוי; וכל המרבה להתוודות ולהאריך בעניין זה, הרי זה משובח.
וכן בעלי חטאות ואשמות--בעת שמביאין קרבנותיהם על שגגתן או על זדונן, אין מתכפר להן בקרבנם, עד שיעשו תשובה, ויתוודו וידוי דברים: שנאמר "והתוודה--אשר חטא, עליה" (ויקרא ה,ה
וכן כל מחוייבי מיתות בית דין, ומחוייבי מלקות--אין מתכפר להם במיתתם או בלקייתם, עד שיעשו תשובה ויתוודו. וכן החובל בחברו או המזיק ממונו--אף על פי ששילם לו מה שהוא חייב לו--אין מתכפר לו, עד שיתוודה וישוב מלעשות כזה לעולם: שנאמר "מכל חטאות האדם" (במדבר ה,ו)
Le Rambam précise aussi que pour que la faute soit expiée, il faut forcément faire Techouva. Même celui qui apportait un sacrifice n’était pardonné que s’il avait fait Techouva. De même les fautes, dont les peines infligées au Tribunal peuvent être terribles (peine de mort, …) ne sont expiées que si le fauteur a fait Techouva.
Juste après, on trouve la seconde Hala’ha du premier chapitre, qui traite du Bouc Emissaire, le Saïr Hamichtalea’h.
שעיר המשתלח--לפי שהוא כפרה לכל ישראל, כוהן גדול מתוודה עליו על לשון כל ישראל: שנאמר "והתוודה עליו את כל עוונות בני ישראל" (ויקרא טז,כא
שעיר המשתלח מכפר על כל עבירות שבתורה, הקלות והחמורות, בין שעבר בזדון בין שעבר בשגגה, בין שהודע לו בין שלא הודע לו--הכול מתכפר בשעיר המשתלח: והוא, שעשה תשובה; אבל אם לא עשה תשובה, אין השעיר מכפר לו אלא על הקלות.
On apprend que le bouc émissaire expie les fautes légères, même si le fauteur n’a pas fait Techouva. En revanche, il n’expie pas les fautes lourdes.
ומה הן הקלות, ומה הן החמורות: החמורות הן העבירות שחייבין עליהן מיתת בית דין או כרת; ושבועת שוא ושקר--אף על פי שאין בה כרת, הרי היא מן החמורות. ושאר מצוות לא תעשה, ומצוות עשה שאין בהן כרת--הן הקלות.
Quelles sont les fautes lourdes ? celles dont les peines précisées dans la Torah sont des peines de mort ou des Karet (retranchement), toutes les autres fautes sont des fautes légères.
Le Rav a demandé : Comment se fait-il que le bouc émissaire permet d’expier les fautes même sans faire Techouva, alors que dans la 1ère Hala’ha nous avons lu que la Techouva est une condition sine qua non ?
La réponse se trouve au début de la seconde Hala’ha :
שעיר המשתלח--לפי שהוא כפרה לכל ישראל
Le bouc émissaire, comme c’est l’expiation pour TOUT ISRAEL.
En fait, le bouc émissaire est le symbole du pardon pour l’assemblée d’Israel, le Tsibour. Alors que pour les fautes liées à l’individu, la Techouva est nécessaire, pour les fautes du Tsibour, la Techouva est facultative.
Le Tsibour, l’assemblée d’Israel, est une supra-entité qui n’a pas besoin de faire Techouva.
Ainsi on retrouve cette distinction au niveau des korbanot (les offrandes, animales ou végétales). Un korban Tsibour, un korban du public, n’est pas un korban apporté par une multitude d’associés, c’est un Korban pour la supra-entité, le Tsibour. Ainsi, le Korban pessa’h est apporté pour plusieurs associés, mais ce n’est pas un koran public, c’est une offrande de particuliers.
Grâce au bouc émissaire, la Torah introduit la notion du Pardon du Tsibour, qui ne nécessite pas la Techouva.
Pourtant, on a bien lu à la Hala’ha 2 que le bouc émissaire sans Techouva ne suffit pas pour les fautes lourdes ?
Pourquoi ?
Parce que les peines de ces fautes sont bien précises, c’est la mort, ou Karet (le retranchement). En fait, la faute est tellement grave que le fauteur se met hors du peuple, hors du Tsibour, hors de l’Assemblée d’Israel. Un tel fauteur ne peut donc pas être pardonné en bénéficiant de l’effet Tsibour puisqu’il ne fait plus partie du peuple. Il s’est mis au ban de l'Assemblée d’Israel. La seule solution, c’est qu’il fasse Techouva pour qu’il retrouve sa place dans le peuple.
Alors que l’on pense que traditionnellement la Techouva est une démarche intime, personnelle, on comprend maintenant qu’il existe une seconde Techouva, celle liée à la dimension du Tsibour. Je dois comprendre que je fais partie d’une entité plus grande que moi, plus grande qu’un groupe d’individus. Et ainsi, je pourrai bénéficier du pardon accordé au Tsibour.
Le Rav a aussi fait remarqué que lors de la Amida de Yom Kippour, on trouve la Bera’ha suivante
« Béni sois tu D., Roi qui pardonne nos fautes et les fautes de Son peuple Israel … »
(Amida de Yom Kippour)
Il y a donc deux pardons : le pardon individuel et le pardon collectif.
3/ Comment obtenir le pardon collectif ?
Depuis quelques années les fractures dans le peuple vont en s'amplifiant… Est-ce vraiment possible de se considérer comme un membre d’une entité supérieure, alors que les autres sont tellement différents, et que parfois ils me haïssent ?
N’ai-je pas le droit de ne pas avoir les mêmes idées ou les mêmes combats que mon prochain ?
Faire partie du peuple ne signifie pas sacrifier ses valeurs ! Faire partie du peuple, ce n’est pas renoncer à ses convictions !
Faire partie du peuple, c’est partager les peines et les joies de l’Autre, même s’il ne pense pas comme moi !
Imaginons une discussion idéologique. Nous pouvons nous opposer, mais cela ne nous donne pas pour autant le droit de rejeter l’autre. S’il souffre, s’il pense que mes idées sont dangereuses pour lui, je ne peux pas simplement faire comme s’il n’existait pas. Je dois comprendre sa peine et ses peurs. Le peuple, l’assemblée d’Israel fonctionne si je considère l’Autre comme mon frère, si j’ai de la peine quand il a de la peine, et si je suis heureux quand il est heureux.
Enfin le Rav a terminé par une discussion dans la Guemara Sanhédrine sur la Techouva.
Est-ce que la Techouva est une condition sine qua none pour la délivrance finale ou non, Rabbi Eliezer pense que oui et Rabbi Yéochoua pense que nous serons délivrés même si nous ne faisons pas Techouva.
Le Rambam tranche comme Rabbi Eliezer : l’homme est libre, et s’il fait Techouva, nous connaîtrons la délivrance !
Pourtant dans les 13 articles de foi, le Rambam nous dit qu’il faut croire et être convaincu que le Machia’h viendra ! Comment le Rambam en est-il si sûr ? Qui dit que le peuple fera Techouva ?
En fait, il faut avoir à l'esprit les prophéties qui nous disent qu’à la fin des temps les Bné Israel feront Techouva.
Croire au Machia’h, c’est donc croire et être convaincu que les Bné Israel feront Techouva.
Même, en ces temps difficiles, nous devons garder espoir ! et agir ! Malgré tous les évènements, nous ne savons que nous avançons dans la bonne direction ! Si nous ouvrons les yeux, nous comprenons que nous devons être reconnaissant envers D. !
Que D. protège tout le Am Israel et que l’humanité chante ensemble D. est Roi !
Chabbat Chalom
GMAR ’HATIMA TOVA