Bechala’h 5783 - Il a grandi le petit !

“Ce fut quand Pharaon renvoya le peuple, D. ne les mena pas par le chemin du pays des Philistins car il était proche, car D. a dit : de peur que le peuple ne regrette en voyant une guerre et qu’ils ne retournent en Egypte”
 (Chemot 13,17),

Après la sortie d’Egypte, nous vivons cette semaine la traversée de la Mer des Joncs.
C'est dans la Paracha Bechala'h que Pharaon regrette d'avoir laissé sortir les Bné Israel d'Egypte. Il les poursuit donc avec son armée, jusqu'à la Mer des Joncs. La mer s'ouvre, les Bné Israel passent à pieds secs, les égyptiens les suivent et sont engloutis. Ils chantent la Chira « Az yachir Moshé ». Plus tard dans la paracha, on présente la manne, la nourriture céleste,  qui tombe chaque jour de la semaine, sauf le chabbat.
La paracha se termine par une guerre contre Amaleq.

Dès le début de la Paracha le ton est donné, les Bné Israel ne vont plus être 100% passif. Même si les miracles sont encore nombreux, et impressionnants, la paracha commence par un “retour sur terre”. Le peuple va prendre un détour pour ne pas avoir à faire une guerre. On aurait pu imaginer encore de nouveaux miracles ! un rouleau compresseur ! Et bien non, dans le cas présent, le peuple va faire profil bas.

C’est vrai, le peuple va recevoir la manne dans cette paracha. Mais les justes recevront la manne devant leur porte, les moins justes devront chercher la manne à l’extérieur du camp…
A la fin de la paracha, Yehochoua va faire la guerre à Amaleq. Même si le succès dépend des prières de Moshé, il faut malgré tout se battre.

Nous comprenons donc qu’il y a une transition en douceur. On passe progressivement du comportement miraculeux à 100%, à un mélange de lois naturelles et de miracles.
On peut tenter un parallèle avec l’éducation des enfants. Au début, une famille accueille un bébé. Elle le nourrit, l’habiller, le laver …. indépendamment des mérites de l’enfant. Le nourrisson ne fait que recevoir. Mais progressivement lorsque l’enfant grandit, on va lui demander de participer. Pour recevoir, il faudra donner… Le but est de le rendre indépendant. On ne peut pas l’assister jusqu’à l’âge adulte, sinon l’enfant sera condamné à rester enfant.

Même si l’enfant fait des erreurs, se fait mal, agit contre son intérêt, cela contribue à le faire grandir !
Pour les Bné Israel, et l’humanité c’est la même chose. Nous sommes passés progressivement du stade d’assisté, à celui d’associé.
Le Rav Yst’haq Hutner (https://en.wikipedia.org/wiki/Yitzchak_Hutner) explique dans le Pa’had que nous a rapporté le Rav cette semaine, que pendant les 26 premières générations de l’humanité (de Adam au don de la Torah), le monde a reçu la bonté gratuite, sans contrepartie.

A partir du don de la Torah, c’est la bonté-justice que l’on reçoit. On ne rase plus gratis !

Rav Yst’haq Hutner compare les débuts de l’humanité à la pluie. Lorsque la pluie tombe, elle tombe pour tous les végétaux, les bons, et aussi pour les mauvaises herbes.
Lorsque l’agriculteur trace un cercle autour d’un arbre, creuse, enlève les mauvaises herbes, il centre son attention sur l’arbre. Il ne soignera que cet arbre spécifique. C’est la bonté-justice, il faut mériter les bienfaits divins.
La sortie d’Egypte est une transition pour nous faire passer d’un monde où tout est gratuit, à un monde où tout se mérite.

Le Rav Yst’haq Hutner compare les 10 paroles “MaAMaRot”, et les 10 paroles “DiBeRot” du don de la Torah. Les paroles de Berechit, Amarot, sont un langage de paroles douces, de don gratuit. Les paroles du don de la Torah, sont DiBeRot, des paroles exigeantes. Le monde est entré dans une nouvelle ère. Il faut mériter les cadeaux divins.

Les plaies, et la sortie d’Egypte sont la transition entre les 10 paroles créatrices du monde, et les 10 paroles du don de la Torah. Progressivement, le peuple va glisser vers la bonté méritée. C’est cela, devenir adulte.

Chabbat Chalom
Stéphane Haim COHEN
www.limud.net