Vaera 5783 - Quel lourd ce Pharaon !

“D. dit à Moshé : le coeur de Pharaon est lourd, il refuse de renvoyer le peuple.”
 (Chemot 7,14),

La paracha Vaera expose le début du processus de la libération des Bné Israel d’Egypte. Ainsi, dans Vaera nous trouvons les sept premières plaies (sur 10) qui ont frappé les Egyptiens, avant la fin de l’esclavage des Bné Israel.
Le verset en entête fait référence au début des échanges entre Moshé et Aaron d’une part et Pharaon d’autre part. Malgré le signe du bâton qui se transforme en serpent, Pharaon est dur. D. dit donc à Moshé que le coeur de Pharaon est lourd [KaVeD].

Que signifie avoir le coeur lourd ? En français, avoir le coeur c’est avoir de la peine. Pour la Torah, ce n’est pas la même chose.

Rashi explique en citant le Targoum Onqelos (et en choisissant une version) : Le coeur de Pharaon est lourd [YaQiR]. Rashi précise attention, il ne faut pas comprendre, “Le coeur de Pharaon s’alourdit”, ce n’est pas un verbe, c’est ici un adjectif.

KaVeD, signifie aussi le foie, l’organe. Un ami proche m’a dit aujourd’hui que c’est probablement parce que le foie est un organe très chargé en liquide (le sang) et donc c’est un organe lourd. Sa masse volumique est plus importante que celle d’autres organes.

Nous avons donc compris la traduction du verset, mais comment faut-il le comprendre ? Que signifie le coeur lourd de Pharaon ?

Comme dit le Rav Benchetrit, le coeur, ce n’est pas le siège des sentiments, le coeur c’est l’essence, le centre de décision. On dit par exemple le coeur du problème, le coeur de la centrale nucléaire.

Si Pharaon a le coeur lourd, cela signifie que son coeur a une forte inertie. Son coeur est lourd, il ne peut donc pas bouger. Pharaon a la coeur lourd signifie qu’il est psychorigide. Son for intérieur est coincé. Il ne va pas changer d’avis. Il entend Moshé et Aaron, il voit les miracles, “le doigt de D.”. Et pourtant il ne changera pas d’avis. Il s’entête. Son coeur est lourd, il ne bouge pas d’un iota.

La Torah nous montre ainsi Pharaon le contre-exemple : celui qui sait, qui a des idées arrêtées, qui entend les autres, mais qui n’écoute pas. Le sage sait analyser la situation et prévoir l’avenir. Le modeste sait écouter les autres, et sait reconnaître ses erreurs. Pharaon n’est ni sage, ni modeste

Le mot Lourd [KaVeD] se traduit en araméen par YaQiR comme le rappelle Rashi. YaQiR, fait aussi référence à quelque chose de cher = YaQaR. Ce qui est lourd est cher. En effet, comme l’a précisé cet ami proche, avant la monnaie fiduciaire, la valeur était proportionnelle au poids de la pièce. On comprend donc le lien entre le poids, ce qui est lourd, et la cherté. En argot, le pèze signifie l’argent. C’est la même idée, l’argent est lourd… il pèse.

Le mot KaVoD, respect, est construit sur les mêmes lettres que l’adjectif lourd. Dans les 10 paroles (ou 10 commandements), on lit “Honore/respecte [KaBeD] ton père et ta mère”. C’est la même idée. L’enfant doit donner du poids à ses parents. L’enfant considère souvent que c’est à ses parents de se corriger. C’est à ses parents de changer. Et bien non !

La Torah nous demande de nous bouger. Nous devons considérer les parents comme le référentiel, et c’est à nous de nous adapter. C’est celà donner du poids à ses parents.

Une fois n’est pas coutume … mais peut être que cela le deviendra voici une musique que j’ai écoutée en écrivant ce commentaire ! Cadeau !
https://www.youtube.com/watch?v=5RWrGIU4j60

Chabbat Chalom.
Stéphane Haim COHEN
www.limud.net