"D. a parlé à Moshé sur le Mont Sinaï en disant … la terre respectera le chabbat [un an]…"
(VAYIQRA 25, 1-2)
Cette semaine, nous lirons la paracha Behar ainsi que la paracha Be’houqotay.
Behar commence par présenter les lois de la Chemita (l'année chabbatique de la terre, on ne doit pas travailler la terre pendant un an), et celles du Yovel (=Jubilé).
Puis, la Torah continue avec de nombreuses lois "sociales", qui assainissent le comportement de l'homme avec son prochain.
Cette paracha nous donne de grands principes de l’économie vue par la Torah.
Le Rav Sacks zal, l’ancien grand rabbin du Royaume Uni, nous présente un sujet nommé “L’économie de la liberté” dans son livre sur la paracha Sig veSia’h.
Il souligne que étonnamment, en 2014, on a eu un livre d’économie best seller. Thomas Picketty, l’économiste français, a publié “Le capital au 21è siècle” et a rencontré un franc succès, même commercial.
Picketty présente la double caractéristique de l’économie de marché. Elle tend à augmenter et à réduire les inégalités.
L’économie de marché permet de diffuser l’éducation, de diffuser le savoir, ainsi les inégalités diminuent.
Néanmoins, cette même économie de marché tend à mieux rémunérer le capital que le travail. Les revenus du capital sont plus importants que la croissance de la production. Alors forcément les inégalités augmentent.
Entre 1979 et 2013, aux Etats Unis, les revenus des 1% de la population les plus riches ont crû de 300%. Ceux des 20% les plus pauvres ont augmenté de 60%.
Le Rav Sacks cite Yichayaou Berlin qui explique que toutes les valeurs ne sont pas forcément compatibles entre elles. Ainsi, la liberté et l’égalité sont antagonistes. Plus la liberté économique augmente, plus les inégalités augmentent.
La paracha Behar nous donne un éclairage sur la façon du judaïsme de considérer l’économie. La Torah reconnaît la tension entre la liberté et l’égalité. Mais elle reste néanmoins engagée à concilier les 2.
La Torah sait très bien que les inégalités ont tendance à croître. C'est pourquoi, tous les 7 ans, les dettes sont annulées. A chaque Yovel, les terres sont redistribuées à leurs propriétaires originels.
Le rav Sacks explique aussi que la Torah a enlevé à l’homme 2 facultés afin de préserver la société.
La terre appartient à D., elle ne peut être vendue à durée indéterminée (Vayiqra 25,23).
L’homme aussi appartient à D. Nous ne sommes que les “esclaves” de D. Nous ne pouvons devenir esclave d’un autre homme. Parfois, le pauvre en vient à se vendre pour subvenir aux besoins vitaux de sa famille… mais c’est à durée déterminée. On vend la force de travail et pas son corps.
Le Rav Sacks termine par souligner que 41% des prix Nobel d'Économie sont juifs. Et nombreux sont ceux, influencés consciemment ou inconsciemment par notre héritage, qui soulignent la nécessité d’une économie qui préserve la liberté de l’homme, et qui par conséquent doit prendre mesure du problème des inégalités.
Chabbat Chalom
Stéphane Haim COHEN