Miqets 5783 et ‘Hanouka - Pauvreté ou asservissement ?

“Et le nom du second, Ephraïm, car D. m’a fait fructifier dans le pays de ma pauvreté”
 (BERECHIT 41,52)

La paracha de la semaine nous raconte l'ascension surnaturelle de Yossef dans la société égyptienne. Il était dans une obscure prison à la fin de la paracha Vayechev (Chabbat dernier), et voici qu'il va devenir vice-roi d'Egypte.
Cette promotion sociale vient du fait que Yossef saura expliquer le rêve de Pharaon. En prison, déjà il avait expliqué le rêve du préposé au vin (Sar Hamachqim) de Pharaon.
A cause de la famine les frères de Yossef vont venir acheter de la nourriture, en Egypte. C’est Yossef qui va les accueillir … froidement. Yossef les reconnaît, mais eux pensent que Yossef n’est plus. Ils n’imaginent pas qu’ils font face à leur frère.
Yossef va tenter de comprendre si ses frères se sont repentis. Regrettent-ils vraiment d’avoir vendu leur petit frère ?
Il met donc en place un stratagème, en emprisonnant Chim’one, puis en les forçant à amener Binyamine, le petit dernier. Yossef se débrouillera pour emprisonner Binyamine, et voir si les frères abandonnent le petit.

Une fois devenu vice-roi d’Egypte, Yossef aura 2 fils de Assenate, le premier Ménaché, le second Ephraïm.
Le second fils est nommé Ephraïm. Yossef est reconnaissant devant D. Il reconnaît que D. l’a fait fructifier dans ce pays d’Egypte. Mais la Torah ne dit pas “pays d’Egypte” (verset en entête), elle choisit de parler de “pays de ma pauvreté”.
Pourtant, Yossef n’est pas pauvre, il est vice-roi d’Egypte ! Onkelos choisit donc de traduire par “D. m’a fait fructifier dans le pays de mon asservissement”. On comprend donc bien que Yossef fait référence non pas à son présent, mais à son passé dans ce pays d’Egypte. Il a commencé sa vie en Egypte comme esclave.

 

Grâce à un proche qui m’a envoyé des commentaires de ce verset, je vous rapporte le Radaq qui explique:

“A l’origine, c’était le pays de ma pauvreté, et maintenant, D. m’a fait fructifier avec des fils, et des richesses”.
Le Radaq nous explique l’attitude de Yossef, il se souvient de son passé difficile, et apprécie son présent. C’est la clé du bonheur pour tous. Utiliser le passé, non pas pour se trouver des excuses, ou s'apitoyer sur son sort. Le passé est un outil pour valoriser le présent.

Peut-être que ce pourrait être un nouvel éclairage sur la discussion entre Beth Hillel et Beth Chamay sur la façon d’allumer les lumières de ‘Hanouka. Beth Hillel disent que le nombre de bougies croît chaque jour. Sans compter le chamach, cela fait une bougie le premier jour, puis deux, trois, … et huit le 8è jour. En revanche, Beth Chamay, disent que le nombre décroît : on part de 8 bougies le premier jour, pour terminer à une bougie le 8è jour.

Nous faisons la hala’ha comme Beth Hillel, le nombre de bougies croît chaque jour. Le 5 è jour, j’allume la 5è bougie, et j’allume aussi les bougies des jours précédents… Le passé est un outil pour apprécier le présent. Aujourd’hui, c’est mieux qu’hier. Mon présent est plus grand que mon passé, c’est la seule solution pour vivre heureux, et se rapprocher de D.

Yossef, en nommant Ephraïm, se souvient de sa pauvreté originelle. Onkelos a choisi de remplacer la pauvreté par l’asservissement, pourquoi ? Quel est le lien entre la pauvreté et l’asservissement ?

Le pauvre est à la merci des autres pour manger. Il n’est pas libre. Son présent ne dépend pas de lui, mais du bon vouloir des autres. Le pauvre est donc en quelque sorte asservi.

Le pauvre n’est pas maître de sa destinée. Mais il y a aussi un autre pauvre, un malheureux, un asservi, qui n’est pas maître. Celui qui n’est pas maître de lui, celui qui réagit au lieu d’agir est un aussi un pauvre à plaindre. Il pourra passer sa vie à être l’esclave de ses passions, de ses colères, de ses défauts…. Ce pauvre ne décide rien … car il ne réfléchit pas, il ne pèse pas ses actions, ses paroles.


Chabbat Chalom. ‘Hanouka Samea’h
Stéphane Haim COHEN
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