Nitsavim 5782 et Roch Hachana 5783

 "Vous vous tenez debout, vous tous, aujourd’hui, devant D. : vos chefs, vos tribus, vos anciens, vos officiers, tout homme d’Israel. Vos jeunes enfants, vos femmes, ton converti qui est à l’intérieur de ton camp, depuis celui qui coupe le bois, jusqu’au puiseur d’eau."
(DEVARIM 29, 9-10)

Cette semaine, nous lisons la paracha Nitsavim. Traditionnellement, Nitsavim est toujours lue le chabbat qui précède Roch Hachana.

… Cela tombe bien parce que la paracha commence par les mots« Vous vous tenez debout, vous tous, aujourd'hui devant l'Eternel … »(DEVARIM 29,9)... comme pour un jugement. En effet, Roch Hachana est le début de l'année, mais ce n'est pas un simple anniversaire, c'est le moment où D. juge toute l'humanité.

Moshé s’adresse aux bné Israel, tous réunis. Moshé va bientôt rejoindre le monde de la Vérité. Une nouvelle alliance est scellée entre D. et les Bné Israel. Le contrat c’est la Torah. C’est d’ailleurs pour cela que tout le peuple est réuni (verset en entête). Tout le monde est là : depuis les chefs, “les gens importants” jusqu’au puiseur d’eau.

“Afin de t’établir aujourd’hui , pour Lui, comme un peuple…” (Devarim 29,12). Le fait d’accepter la Torah, c’est cela faire un peuple. Mais on peut aller plus loin, si les chefs et les gens les plus simples forment un seul peuple, c’est parce qu’ils acceptent la Torah. Le fait que tous se considèrent comme debout devant D., permet à chacun de se considérer l’égal de son prochain. Ainsi on forme un peuple. Lorsqu’une nation est rongée par les inégalités, et par les clans, elle court à sa perte. Il suffit de regarder ce qui se passe dans de nombreuses sociétés du monde occidental. Les riches se ghettoïsent, les pauvres se ghettoïsent, les étrangers se ghettoïsent, les autochtones aussi. La Torah remet tout le monde à égalité. Pour Roch Hachana, aussi, nous serons tous debouts devant D. … tous égaux !

La suite de la paracha, la suite du contrat ressemble à une prophétie qui s’est réalisée. Si le peuple se détourne de D. alors il ne méritera pas de rester sur la Terre promise. “Et ce sera quand il entendra les paroles de ce serment; il se bénira en son coeur en disant : J’aurai la paix, je suivrai les passions de mon coeur…” Devarim 29,18.
Celui-là, D. ne voudra pas lui pardonner. Alors que tout le monde est debout, pour le jugement, celui qui veut faire cavalier seul et croit qu’il pourra échapper à ses obligations, verra s’abattre sur lui les malédictions de la paracha précédente.

Notre paracha nous promet que si le peuple se détourne de D. alors la terre deviendra inculte “souffre et sel, toute sa terre brûlée, qui ne pourra plus être semée” Devarim 29,22.
La paracha continue sur ce qui pourrait encore être une prophétie. “Tu retourneras vers l’Eternel ton D. et tu écouteras Sa voix…” Devarim 30,2
“Et D. reviendra avec tes captifs, Il aura pitié de toi et te rassemblera à nouveau d’entre tous les peuples parmi lesquels l’Eternel ton D. t’aura dispersé” Devarim 30,3

La Torah nous promet qu’au bout du compte nous reviendrons sur notre terre… C’est ce que nous vivons aujourd’hui. Comment ne pas être reconnaissant ? Après 2000 ans de souffrances et d’exil, nous sommes enfin de retour, et nous avons la possibilité de créer une société qui pourrait devenir un exemple pour le monde entier.


Aujourd’hui, nous avons du mal à imaginer ce qu'ont été les souffrances du peuple juif au quotidien. Si aujourd’hui le sort des juifs dans le monde s’est amélioré, c’est parce qu’il existe un pays des juifs !
Ce matin j’étudiais avec un ami le début du 2è chapitre de la guemara Kidouchine. Rav Yehouda dit au nom de Rav “Il est interdit pour un homme de marier sa fille quand elle est petite” (Kidouchine 41a). Les Tossefote commentent : et nous qui avons l’habitude de marier nos filles même petites, c’est parce que l’exil est de plus en plus dur. Lorsqu’un homme a la possibilité matérielle de marier sa fille, il le fait. On ne sait pas de quoi est fait le lendemain.


Aujourd’hui, nous vivons dans l’opulence. Nous n’avons plus ce type de problème. Alors nous nous créons d’autres problèmes. Nous ne savons pas ouvrir les yeux pour dire merci. Nous croyons que nos problèmes sont de grands problèmes…. mais nous sommes la source de nos problèmes. Et nous ne le réalisons même pas.


A Roch Hachana, nous allons être jugés. C’est le moment de revenir aux fondamentaux. C’est le moment de faire Techouva.
Le Rambam nous explique comment on fait Techouva, comment on se repentit (Hil’hot Techouva 2,2) :

  • Il faut d’abord abandonner la faute
  • Il faut ensuite s’engager à ne plus recommencer à l’avenir
  • Il faut regretter la faute
  • Il faut dire la faute qui été commise, c’est le vidouy

Comme me le rappelait un ami ce matin, le Rambam est très pointilleux, et tout compte chez lui, le choix des mots, l’ordre…


Alors pourquoi ne pas commencer la techouva par regretter la faute ? C’est la question qu’a posée le Rav vendredi soir dernier.
La logique c’est de commencer par regretter le passé, de traiter le présent, et de s’engager sur l’avenir. Au lieu de cela, le Rambam nous demande de traiter le présent (abandonner la faute), de s’engager à ne plus recommencer (l’avenir), et ensuite de regretter le passé.


Le Rav a expliqué que lorsque l’on commet une faute plusieurs fois, celle-ci devient une deuxième nature. L’homme n’aime pas vivre dans la contradiction. Il va donc se convaincre que la faute n’est pas une faute “Naassite lo ké hétere”. Un homme habitué à commettre une faute ne réalise plus qu’il faute. Logiquement, on ne peut donc pas commencer par regretter quelque chose qui est permis.

Il faut donc commencer par abandonner la faute au présent, puis à s’engager sur l’avenir. S’engager, sur un élan de ferveur, ou de son coeur, c’est envisageable. Et puis petit à petit, nous allons rendre la faute étrangère à nous. Ainsi nous pourrons réaliser les erreurs commises et regretter aussi le passé.


On pourrait dire, pourquoi se torturer ? pourquoi tout simplement ne pourrait-on pas s’engager, et oublier le passé ? En regrettant, je vais changer ma nature, je vais retrouver ma vraie nature, je construis un bouclier qui m’empêchera de chuter à nouveau. Et ainsi même D. pourra témoigner que je ne chuterai plus !
Alors à chacun ses bonnes résolutions ! Le fait de prendre des résolutions c’est déjà avoir conscience que nous ne sommes pas parfaits, qu’il reste du travail à réaliser ici bas !

Chabbat Chalom
Chana Tova
Ketiva Va’Hatima Tova

Stéphane Haim COHEN