Roch Hachana 5784

Vendredi soir nous commencerons l’année 5784. C’est Roch Hachana=La tête de l’année.


En rentrant de la synagogue, nous commencerons le repas par le “Seder de Roch Hachana”. Nous mangerons des aliments dont le nom, ou les propriétés sont associés à une prière sur la nouvelle année qui commence. Ce sont les simanim (signes).

Exemple, pour la datte, TAMAR, nous dirons :
Qu’il soit ta volonté Eternel notre D. et D. de nos pères, qu’il y ait une fin [chéyiTAMOU] à nos ennemis, ceux qui nous haïssent et tous ceux qui nous veulent du mal.
TAMAR nous fait penser à chéyiTAMOU = qu’il y ait une FIN.

Exemple, pour la pomme trempée dans le miel :
Qu’il soit ta volonté Eternel notre D. et D. de nos pères, que nous ayons une nouvelle année bonne et douce comme le miel.
Cette fois-ci, on goûte un aliment doux qui fera penser à la douce année.

Et ainsi de suite pour les autres signes.


Comment fonctionnent les simanim ? Est-ce de la magie ? En mangeant un petit bout de pomme, et en récitant une prière, vais-je vraiment intervenir sur mon sort durant cette année qui commence ?

Alors, comme je l’ai déjà rappelé, le Rav a cité Rav Yossef Albo qui explique que l’homme qui prie se transforme. Avant la prière et après la prière ce n’est plus le même homme, et c’est pour cela que le jugement divin peut changer.
En choisissant cette explication, on assimile le seder des simanim avec une simple prière. Or, les Maîtres du Talmud qui ont introduit les simanim (Guemara Kritout et Horayot) n’ont pas introduit une prière… ils ont dit :


“ Abayé dit : Maintenant qu’on sait que les simanim (les signes) ont un impact, un homme devra toujours voir à Roch Hachana : de la courge, des haricots, des poireaux, des epinards, des dattes” (Guemara Horayot 12a).

Notons que la guemara Kritout 5b dit quasiment la même chose, à la différence près qu’il y est enseigné “un homme devra toujours manger [au lieu de voir] à Roch Hachana ….” Le Tour a repris le langage de “manger”.

On a pris l’habitude d’ajouter une prière “Yehi Ratson”, dont la guemara ne parle pas. Le Meiri explique que c’est pour éviter de croire bêtement, que les simanim sont de la magie ! Le Meiri précise que ces Yehi Ratson doivent nous rappeler la solennité du jour, le jugement qui a lieu et l’importance d’exterminer nos ennemis qui sont en nous : les fautes commises.

Insistons :  lorsque l’on souhaite la fin de nos ennemis, il faut penser à notre plus grand ennemi, notre mauvais penchant. En effet, commencer l’année en étant persuadé que la source de mes problèmes se situe chez mes ennemis est complètement contre-productif. C’est juste un moyen pour éviter de me remettre en question. En revanche, en pensant à l’ennemi de l’intérieur, ma tendance à m’égarer, alors j’ai une chance de progresser, et de commencer l’année du bon pied.

Alors, comment comprendre le fonctionnement des simanim ?

Voici une histoire qui va peut-être nous éclairer sur les simanim (j’espère que je ne raconte pas de bêtises !).

C’est l’histoire de Lévi SYBEL, qui n’est pas lévi, car Lévi, c’est juste son prénom. Son nom c’est SYBEL. Lévi Sybel, aime étudier le matin sur son balcon avant d’aller prier. Au mois de juin, lorsqu’il arrive sur son balcon, il fait déjà jour dehors, tout va bien. Il commence son étude à 6:00, et il fait déjà grand jour dehors. Mais, lorsque le mois de septembre arrive, Lévi doit forcément allumer la lumière sur son balcon afin de pouvoir voir quelque chose et étudier convenablement.
Vers 6:50, Lévi ferme son livre et part à la synagogue pour prier. Il fait déjà jour. Et comme il fait jour, il ne réalise pas que la lumière du balcon est allumée, alors il part à la synagogue, sans éteindre la lumière… Ce n’est que le soir, à son retour du travail, qu’il remarquera qu’il a laissé la lumière allumée toute la journée. Lévi se promet donc de faire plus attention le lendemain, mais rebelotte… il oublie encore d’éteindre la lumière. C’est vrai qu’il a une circonstance atténuante. En plein jour, on ne remarque pas que la lumière est allumée !

Au bout d’une semaine, Lévi a une idée. Près de l’interrupteur qui commande la lumière du balcon, se trouve une table. En allumant la lumière chaque matin, il décide donc de poser ses clés de maison sur la table. Ainsi, en partant à la synagogue, il prendra ses clés, et cela lui fera penser à éteindre la lumière !
Et, comme par magie, cela fonctionne. La semaine suivante, Lévi n’a pas oublié une seule fois d’éteindre la lumière… jusqu’au jour où Levi a oublié de poser ses clés sur la table près de l’interrupteur ! Mais ce jour-là… miracle ! C’est un miracle ! Lévi, sans avoir posé les clés sur la table, il n’oublie pas d’éteindre la lumière.

Explication :
Les clés sont pour Lévi un signe. Il associe les clés au fait de ne pas oublier d’éteindre la lumière. Mais lorsque Lévi s’est habitué à éteindre la lumière, il n’a plus besoin de faire d'efforts de mémoire. Pour lui éteindre la lumière est devenu naturel.

Les Simanim de Roch Hachana, ne sont pas que le support à une simple prière. Les simanim ont une importance par eux-mêmes. A Pessa’h, on lit les 10 plaies d’Egypte, et juste après Rabbi Yehouda donnait des simanim sur les plaies : “DeTSa’H - ‘ADaCH - BaA’HaV”
C’est entre autres, un moyen mnémotechnique pour se souvenir des plaies.

De même la guemara commence régulièrement une souguia en donnant un simane. Ce sont souvent des initiales, ou des mots qui m’aideront à me souvenir de la succession d’enseignements. Ce sont des signes qui m’aideront à intégrer en moi le chemin de la guemara. Ils m’aideront à combattre l’oubli.

Les signes que l’on multiplie à Roch Hachana sont tous construits de la même façon. Le but de ce que l’on mange (ou regarde) doit nous faire penser toute l'année à :

  • Chercher à multiplier nos mérites
  • Chercher à faire disparaître nos fautes
  • Chercher à vivre une bonne et douce année


Le quotidien peut nous faire rapidement oublier nos objectifs. Si je veux que la prochaine année soit douce, je dois être convaincu qu’elle sera douce. Et j’ai besoin de signes pour m’en rappeler. Quand tout est clair autour de moi, je n’ai même plus les yeux pour remarquer qu’une lumière est allumée. Tout est naturel. Je ne me rends même pas compte de tous les bienfaits dont D. me comble. Comme Lévi, de l’histoire, il ne se rend pas compte que la lumière est allumée. Pour comprendre que D. nous comble de Ses bienfaits, il faut savoir ouvrir les yeux. Si je veux une bonne année, je dois me forcer à intégrer en moi, et tous les simanim sont bons pour cela, que l’année sera bonne. Si je pense positif, alors l’année sera positive.

Si je pense à faire disparaître mes fautes, si je me procure des simanim qui me permettront de ne pas oublier, alors, j’ai des chances de progresser tout au long de l’année. A Roch Hachana, je multiplie les signes, pour que, même lorsque je n’aurai plus les simanim devant moi, je penserai à augmenter mes mérites, à combattre mes fautes et à vivre une bonne année !

A l’instar de Lévi, qui se souvient d’éteindre la lumière, même lorsque le simane (les clés) n’est pas là, il faudra utiliser les simanim pour ancrer en nous les grands principes qui devront nous guider lors de l’année à venir.

CHABBAT CHALOM
Chana Tova
Ketiva VaHatima Tova
Stéphane Haim COHEN
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