Tsaw 5782 qui suit Pourim

 
"Ordonne à Aaron et à ses fils en disant, voici la loi de la ‘Ola [sacrifice entièrement consumé sur l’autel]…"
(VAYIQRA 6,2)

Tsav est la seconde paracha du 3è livre de la Torah, le lévitique. Cette paracha, comme la plupart des parachiot du Lévitique, est consacrée au service du Temple.

Avant de commencer, je tiens à définir un mot. On traduit " 'Ola" par "holocauste", cela correspond à un sacrifice qui était entièrement brûlé, et donc consacré entièrement à D. Par opposition à d'autres sacrifices ('Hatat, Chelamim, …) pour lesquels une partie de ce qui était consacré pouvait être consommé par le Cohen ou par la personne qui apportait l'offrande.

Rachi explique pourquoi la Torah utilise le verbe « ordonner » pour s’adresser à Aaron et ses fils :
« Rabbi Chim’on dit : le verset se doit d’inciter [les cohanim] (par le verbe « ordonner ») car il y a un manque d’argent ».

En effet, comme la ‘Ola est entièrement brûlée par opposition aux autres offrandes, alors il faut insister … pour motiver les Cohanim.

Chaque fois qu’on touche à la poche, il faut motiver.

De même Pourim est un moment où l’on doit se motiver, les sollicitations sont nombreuses. Mais, nos maîtres ont fixé que Pourim est la fête des pauvres… Festoyer c’est bien, mais festoyer égoïstement c’est vide de sens. Le pauvre aussi a le droit de festoyer. Rappelons que Pourim, c’est 4 commandements !
1/ Envoyer des mets
2/ La séouda
3/ Donner aux pauvres
4/ Ecouter la Meguila.

Dans l’avant dernier chapitre de la Meguila Esther on lit
“Et on expédia des lettres à tous les juifs dans les 127 provinces de l'empire d'Assuérus, un message de paix et de vérité; pour instituer CES JOURS de Pourim à leur date, … Esther (9,30-31)

Le Meche’h Ho’hma rappelle que nos Maîtres ont utilisé ce verset pour montrer qu’on lit la Meguila à des dates différentes, selon qu’on habite dans un petit village ou une ville. Ainsi les habitants des petits villages avançaient la lecture. C’est pourquoi la Meguila pouvait être lue à partir du 11 Adar, en fonction du jour de la semaine où tombe le 14 adar.

Le Meche’h Ho’hma rapporte la guemara Yebamot, où Rich Laqich objecte : et pourtant, on n’a pas le droit de faire des scissions dans le peuple ? (Lo Titgodedou). Alors pourquoi lire la meguila à différentes dates ?

Le Meche’h Ho’hma rapporte des Richonim qui précisent l’essence de l’interdit de faire des scissions.

Ainsi, dans Yebamot, certains mariages permis pour Beth Hillel sont interdits par Beth Chamay (interdit de Yebama la chouq, voir Yebamot). Inversement certaines unions autorisées par Beth Chamay, sont gravement interdites par Beth Hilel (Tsarot Erva).

Les positions de Beth Hillel et Beth Chamay sont antagonistes. Ce qui est vérité pour l’un est une faute pour l’autre. Dans ce cadre, il y a l’interdit de faire scission. Dans ce cas, il faut trancher, et tout le peuple doit appliquer la même loi.
En revanche, pour les différentes dates de lecture de la Meguila, il n’y a pas de discussions. Même s’il y a plusieurs dates, les uns ne considèrent pas que les autres sont dans l’erreur. Le verset cité  plus haut de la Meguila parle de “vérité”. La lecture de la Meguila, même à des jours différents, est une vérité pour tous.

On apprend ici un principe fondamental : si je considère que l’autre est dans le vrai, même lorsqu’il n’applique pas la même loi que moi, alors il n’y a pas de danger pour le peuple.
S’opposer à l’autre, sur le plan des idées, ou des actes n’est pas dangereux pour l’unité du peuple, si je considère, que je détiens la vérité, mais aussi que mon prochain détient la vérité.

En revanche, dès que les vérités sont exclusives l’une de l’autre, alors il y a l’interdit de Lo Titgodedou. Il faut trancher, et garder une seule loi.

Chabbat Chalom et Pourim Samea’h
Stéphane Haim COHEN