«Les devins dirent à Pharaon, c’est le doigt de D. Mais le coeur de Pharaon s'endurcit … »
Chemot (8,15).
La paracha de la semaine, VAERA, expose le début du processus de la libération des Bné Israel d’Egypte.
Ainsi, dans Vaera nous trouvons les sept premières plaies (sur 10) qui ont frappé les Egyptiens, avant la fin de l’esclavage des Bné Israel.
La 3è plaie c’est la vermine (des poux, et/ou des insectes ressemblants) qui frappe les égyptiens et leurs animaux.
Les mages égyptiens essaient de reproduire le phénomène, ils n’y parviennent pas et déclarent : “c’est le doigt de D.”.
Ce matin, j’ai étudié la guemara Bera’hot 28b avec un ami.
On y trouve l’histoire suivante :
Lorsque Rabbi Eliezer est tombé malade (il était au seuil de la mort), ses élèves sont venus le visiter et lui ont demandé : Notre Maître, apprends nous les chemins de la vie pour que nous puissions avoir le mérite de la vie dans le monde futur. Il leur a dit : Faites attention au respect de vos amis, éloignez vos enfants du “Higayon”, faites les fréquenter les sages, et quand vous priez, sachez devant qui vous vous tenez”.
Rashi explique ce que signifie “éloignez vos enfants du Higayon” : ne leur enseignez pas trop la Torah écrite, car cela attirera leur coeur et ils étudieront moins la loi orale.
La nature de l’enfant va peut-être le pousser à la paresse, à étudier des choses agréables, qui ne requièrent pas d’efforts … Mais ce qu’il faut c’est l’entraîner vers la Loi Orale. Au début, ce n’est pas simple, le plaisir d’étudier n’est pas encore au rendez-vous. Mais en faisant des efforts, l’enfant grandira et prendra progressivement du plaisir dans l’étude. Il découvrira ainsi les secrets de la Torah Orale ET de la Torah écrite.
Rashi donne aussi une seconde explication : éloignez vos enfants des conversations futiles.
Le Méiri explique que le Higayon, c’est l’explication littérale de la Torah. Rabbi Eliezer dit : éloignez vos enfants des explications littérales de la Torah écrite. Cela mène à des contre-sens.
Ainsi, dans le verset en entête on parle du doigt de D.
Le Méiri, à l’instar du Rambam, veut nous faire comprendre qu’il est facile de se tromper à lisant la Torah au premier degré. Certains diraient ainsi (D. préserve) que D. a un corps !
NON ! Il faut éduquer les enfants à dépasser le sens premier de la Torah écrite.
Les sorciers de Pharaon ont reconnu “le doigt de D.” parce qu’ils n’ont pas réussi par leurs formules magiques à reproduire le phénomène et à créer la vermine. Mais, il semble que c’était une exception, souvent, par leurs incantations ils parvenaient leurs fins. Ils savaient utiliser la force du langage pour changer la nature.
Au recto de la même page de la guemara Bera’hot (donc 28a), on nous explique un verset de Tsefania (3,18). On traduit ainsi le mot “Nougué” par “Tavra” = crise, malheur.
Et la guemara continue, comme traduit Rav Yossef : “le malheur vient sur les ennemis d’Israel”. En fait, la guemara veut parler d’un malheur qui frapperait Israel, et elle préfère dire les ennemis d’Israel. La guemara nous montre qu’il ne faut pas prononcer des paroles néfastes. Tout se passe comme si, la force du langage est telle que si on utilise l’expression “malheur sur Israel”, cela risque de précipiter un tel évènement.
Aujourd’hui, j’ai peut-être une autre explication sur cette formulation de la guemara. On parle de “malheur sur les ennemis Israel”, car on ne veut pas dire du mal du peuple d’Israel. Il y a des moments, où il faut savoir fermer sa bouche, et ne pas faire entendre de critique sur telle ou telle partie du peuple. Même je suis persuadé que l’autre se comporte mal, il y a des moments où je dois me taire. Je ne dois pas sortir un mot mauvais sur le peuple d’Israel. Je ne dois pas oublier que l’autre qui ne pense pas comme moi, et qui se trompe peut-être… est malgré tout mon frère.
Chabbat Chalom
Stéphane Haim COHEN
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