« Le Rocher [le Créateur] parfaite est Son œuvre, car toutes Ses voies sont jugement, un D. fidèle et sans iniquité, Il est juste et droit.»
(DEVARIM 32,4)
Ce chabbat, c’est chabbat Chouva, en référence à la haftara qu’on lira. Ce chabbat, entre Roch Hachana et Yom Kippour est donc une invitation au retour aux fondamentaux, au retour aux valeurs de la Torah.
Comme d’habitude, tout ce que j’écris, c’est pour moi, ce n’est pas une leçon que je donne au lecteur. J’écris pour mes proches et pour moi.
La paracha Aazinou, que nous lirons Chabbat est un chant dans lequel Moshé prend le ciel et la terre à témoin. On y lira le verset en entête, qu’on ne peut pas ne pas mettre en parallèle avec Yom Kippour.
A Roch Hachana, c’est le début du jugement ; à Yom Kippour, le jugement sera scellé (Guemara Roch Hachana 16a).
Nous allons nous présenter devant D. On le qualifie de “Bo’hen Levavot” dans le chant Adon HaSeli’hot. Cela veut dire que D. scrute les coeurs. Bo’HeN = scruter, contrôler, c’est de la même famille que miV’HaN (un contrôle), ou Bo’HaN.
Pour une voiture, le contrôle technique est effectué chaque année. Il faut vérifier si elle a les moyens de continuer à remplir sa fonction pendant un an. Même si la voiture n’a pas de volonté propre, je dois malgré tout la contrôler.
Un enfant, qui va à l’école, et dont l’éducation est sous-traitée à un professeur, je dois le contrôler. Si je ne vérifie pas les devoirs, et la progression de l’enfant, alors clairement j’irai droit dans le mur. Si je n’ouvre pas son cahier de correspondance… il pourra facilement me dire que tout va bien, qu’il n’y a pas de devoirs, …
Contrôler l’enfant montre que l’on est soucieux de son développement. Et l’enfant, au fond de lui, sera heureux d’être important pour ses parents.
L’institution en qui j’ai confiance, et à qui je remets mon enfant pour réaliser son éducation scolaire, doit être contrôlée. Ce n’est pas parce que je paie des frais de scolarités, ou que les professeurs ont de belles barbes, ou que la sélection à l’entrée est sévère, que je dois signer un chèque en blanc.
Je dois contrôler dans la mesure de mes possibilités si l’institution est efficace, et D. préserve qu’elle ne crée pas de dégâts !
J’ai donné une mission, et des moyens à une institution scolaire, je me dois donc de vérifier que la mission est atteinte.
Lorsque que je confie à un architecte ou à un entrepreneur de travaux la mission de me construire un immeuble, je dois forcément le contrôler. Si je ne le fais pas je serai déçu :
- formalités administratives déficientes
- délais non respectés
- problèmes que je découvre trop tard...
Cela fait partie de la vie ! il faut contrôler ! Même si tous les acteurs sont de bonne foi, il faut contrôler ! C’est la condition nécessaire au succès de l’opération.
Lorsqu’une société commerciale grandit et que les propriétaires sous-traitent la gestion de la société, on peut assister à ce que l’on nomme en finance un conflit d’agence. Les actionnaires ne participent pas à la gestion de la société, et veulent maximiser leur patrimoine. Ils ont confié la mission à des dirigeants, qui n’ont pas les mêmes intérêts.
Pour caricaturer, l’actionnaire veut plus de bénéfices, et le dirigeant veut profiter des bénéfices dont il est à l’origine. Le dirigeant pourra donc expliquer qu’il est important pour la réputation de l’entreprise que ses dirigeants roulent en Porsche 4x4 !
L’actionnaire a nommé un dirigeant. Il lui a donné une mission et des moyens. L’actionnaire doit donc forcément contrôler que le dirigeant se conforme à la mission qui lui a été assignée. Encore une fois, même si le dirigeant est de bonne foi, il peut se tromper. Ses intérêts personnels peuvent l’aveugler !
Lorsque nous fêtons Pessa’h, la première fête du calendrier dans la Torah, nous revivons la sortie d’Egypte. D. nous a fait sortir de l’Egypte. Et nous Le remercions chaque jour de nous avoir fait sortir d’Egypte. Il nous a donné la vie physique en nous faisant sortir d’Egypte
La seconde fête de Torah, c’est Chavouot. D. a fait de nous un peuple en nous donnant la Torah. C’est l’ordre de mission que nous avons accepté.
Nous avons donc des moyens (physiques) et une mission, l’application de la Torah.
Il faut donc contrôler. C’est la nature. Si on ne contrôle pas on ne peut pas avancer.
Après chavouot, on trouve donc les rencontres du 7è mois de la Torah. Roch Hachana et Yom Kippour sont le contrôle nécessaire au succès de la mission.
La Torah veut notre bien, et c’est pour cela qu’ont été fixés des rendez-vous propices à l’introspection. Car comment se faire juger, si auparavant je ne me juge pas moi-même ?
Une fois par an, je suis donc jugé.
La guemara Roch Hachana 16a présente une brayta, avec d’autres avis. Rabbi Yossi dit que l’on est jugé chaque matin. Rabbi Natan dit que l’on est jugé à chaque instant, comme il est dit “A chaque instant Tu le [à l’homme] scrutes/contrôles” (Job 7,18).
Peut-être que Rabbi Natan veut nous montrer l’objectif. Il faut tendre vers la situation où l’on se sent jugé par D. à chaque instant. En effet, en comprenant qu’à chaque instant je me présente devant D., je vais peser et penser mes actes. Je ne fuis plus.
A Yom Kippour on lit le livre de Jonas pour que l’on comprenne, entre autres, que la fuite ne sert à rien.
En ayant pleinement conscience de mes actes, j’agis comme un homme, et non plus comme un animal qui agit par réflexe, sans penser.
Cette conscience permanente va aussi me permettre de m’accomplir, et de me rendre heureux. Si j’agis en pensant mes actes, je suis forcément heureux, car J’ai décidé d’agir. Ce qui rend malheureux c’est d’agir en mode automatique, sans être maître de mes décisions.
Profitons de ces moments de proximité, pour intégrer que le meilleur contrôle, c’est l’auto-contrôle ! Faisons notre introspection pour tendre vers l’auto-contrôle permanent !
שִׁוִּיתִי יְהוָה לְנֶגְדִּי תָמִיד (Tehilim 16,8)
CHABBAT CHALOM
Gmar ‘Hatima Tova
Stéphane Haim COHEN
www.limud.net