Pessa’h 5783
"Dans chaque génération, l’homme doit se voir [LiROT] comme s’il était sorti d’Egypte"
(Michna dans Pessa’him 116b, reprise dans la Hagada)
Ce soir, mercredi, nous allons vivre Pessa’h, le seder.
L’extrait de la michna cité en entête formule une demande bien originale. Ce n’est pas un commandement de type action comme manger, ou dire. C’est un commandement sur mon ressenti, mes pensées.
Ce n’est pas simple de commander ses pensées. Faire, c’est simple… mais aimer ou ressentir sur commande, c’est loin d’être simple.
[Il est clair que ce je raconte ici est au moins en partie inspiré de ce que j’ai pu comprendre d’un cours du Rav Benchetrit. Bien évidemment, si ce que je raconte est incorrect, c’est du fait de ma mauvaise compréhension, ou tout simplement parce que je me trompe.]
Le Rachbam qui commente la guemara a une version différente de la michna. Il n’écrit pas l’homme doit se voir, mais l’homme doit se montrer [LeHaROT]. De même le Rambam dans les lois ‘Hamets et Matsa (Chap 7, Hala’ha 6), écrit, l’homme doit se montrer.
Alors clairement, utiliser le verbe montrer fait entrer l’autre dans l’histoire. Pour montrer, il faut un autre à qui je vais raconter la sortie d’Egypte. Mais ce n’est pas qu’à l’autre que l’on doit montrer, c’est à soi-même.
Si je dis “l’homme doit se voir”, il y a un risque énorme : se comporter en spectateur. Lorsque je dis “l’homme doit se montrer”, cela m’oblige à faire un acte et à le mettre en adéquation avec ma pensée. Je dois montrer, d’abord à moi-même, que je suis sorti d’Egypte.
Et en pensant ce que je fais, en unifiant ma pensée et mes actions, je montre forcément que je suis sorti d’Egypte. Quel est le propre de l’homme libre ? Penser et Agir en conséquence. Si je décide de penser mes actes, alors je deviens maître de moi-même. Je suis libre. Je deviens acteur, et je ne reste pas spectateur.
Voir, c’est être spectateur. Montrer c’est être acteur.