Beaalote’ha 5785

"Ils dirent [Myriam et Aaron] est-ce seulement avec Moshé que D. a parlé ? N’a-t-Il pas aussi parlé avec nous ? D. entendit.
Et l’homme Moshé était très humble, plus que tout homme sur la surface de la terre."
(Bamidbar 12,2-3).

La paracha de la semaine commence par la présentation de la mitswa confiée à Aaron : l’allumage de la Menora, le chandelier à sept branches. Elle termine par le passage de la médisance de Myriam et Aaron sur Moshé.

Aujourd’hui, j’ai ouvert le livre ‘Ham Hachemech, du Rav Chalom Messas zal, recueil de commentaire sur la paracha de la semaine. Il rappelle le passage où Myriam et Aaron font de la médisance sur Moshé.

Il cite Rashi qui décrit la scène. 
D’où Myriam savait-elle que Moshé s’était éloigné de son épouse ? Rabbi Natan dit que Myriam et Tsipora (la femme de Moshé) se tenaient près de Moshé quand on lui a annoncé que Eldad et Medad prophétisait bien qu’ils se tenaient dans le camp. Tsipora réagit : malheur à celles dont les époux sont prophètes ! Ils vont se séparer de leurs femmes, comme mon mari s’est séparé de moi.

C’est ainsi que Myriam a su que Moshé s’était éloigné de son épouse, pour mieux s’approcher de D.

Le verset en entête nous présente la réaction de Myriam : Nous aussi, nous sommes des prophètes, et pourtant nous n’avons pas mis fin à notre vie conjugale !

Myriam semble donc parler et agir pour le bien de sa belle-soeur. Elle semble agir pour que la justice soit rétablie.

Le verset suivant m’a étonné. Pourquoi la Torah a-t-elle besoin de nous dire que Moshé est l’homme le plus humble, juste à ce moment ?

J’espère que je n'écrirai pas de bêtises !

Mais en tout état de cause cette juxtaposition est étonnante. Le Ramban nous dit que la Torah tient à souligner l’humilité de Moshé, pour expliquer la suite. 
D. va intervenir pour défendre Moshé, tout simplement parce que Moshé est le plus humble des hommes, et qu’il ne souhaite surtout pas répondre à ceux qui le critiquent.

C’est D. qui intervient pour expliquer que Moshé n’est pas un prophète comme les autres. D. se révèle aux prophètes dans des visions, lors de rêves. Mais avec Moshé D. se révèle sans énigme… Il se révèle en “face à face”.


La Torah souligne peut-être l’humilité de Moshé pour faire ressortir la cause de la médisance. Myriam a été orgueilleuse. Elle dit, nous aussi nous sommes prophètes ! Et nous n’avons pas besoin de mettre de côté nos relations conjugales !

Elle analyse donc le comportement de son frère par rapport à sa vision des choses. Elle pense avoir adopté le bon mode de fonctionnement. Elle veut l’appliquer aux autres. La référence c’est sa façon d’être, c’est donc de l’orgueil. Qui me dit que l’autre n’est pas dans le vrai.

Nous aussi, nous jugeons souvent l’autre selon notre vérité. N’avons-nous pas aussi entendu : 
L’autre passe sa journée à étudier la Torah, alors qu’il pourrait partager son temps entre le travail et l’étude !
Je veux appliquer mon modèle à l’autre. C’est de l’orgueil ! 

D’une part, la plupart des problèmes de société naissent parce que je veux imposer mon modèle à l’autre. D’autre part, chacun ne peut pas tirer la couverture à lui. Je dois parfois sacrifier mon intérêt personnel au profit de l’intérêt du groupe. Où est la limite ?

Alors même si les divisions semblent plus fortes en Israel qu’ailleurs, j’ai l’espoir que nous nous en sortirons ! Grâce à une phrase magique nous pouvons nous en sortir “Tout Israel est frère”. Si je considère l’autre comme un frère, alors je pourrai accepter qu’il se trompe (selon mes critères)  sans tout faire pour l’écraser.
Si mon frère [je n’ai pas de frère biologique] me fait du mal, je lui pardonnerai parce que c’est mon frère, parce que je l’aime.
Et au bout du compte, si nous nous comportons comme des frères, nous ferons la volonté de Papa, notre père qui est au Cieux.
 

Chabbat Chalom

Stéphane Haim COHEN

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